tome 34 (n°115-119) - de l'Université libre de Bruxelles

PAUL ANDRÉ 311
Une dette. — Sans passer par les fourches caudines du « Comité
officiel du Théâtre Belge », deux jeunes auteurs bruxellois ont
fait leur premier essai dramatique. Le Cercle Euterpe, qui se prodigue
avec la plus louable vaillance au service d'une cause que tant
d'autres trahissent qui devraient la défendre, ont accueilli leur
pièce et l'ont montée avec des soins minutieux.
Une dette n'est pas exempte de défauts. Mais si l'on tient compte
qu'il s'agit d'un début ou s'accordera à lui trouver de précieuses
qualités. Les auteurs ont sans conteste le sens du théâtre. Ils ont
su intéresser et émouvoir. Ils ont charpenté adroitement leurs quatre
actes copieux.
Les longueurs inévitables, surtout quand le travail de répétitions
n'est pas poursuivi comme il le pourrait être sur une scène régulière,
ont apparu à la représentation; elles seront facilement élaguées.
L'inutilité de quelques épisodes n'empêche pas les scènes
capitales de porter. A côté de personnages trop conventionnels il y
a un ou deux caractères bien dessinés. Si le sujet traité n'est pas
d'une absolue nouveauté, nous le voyons renouvelé non sans adresse.
Au total donc, on peut trouver des plus estimable la tentative
de MM. Rivelle et Sédillot. C'est du théâtre d'intrigue selon la formule
que les esthètes nébuleux proclament abolie et grotesque.
Comme tout le monde ne partage pas cet avis d'exception, il se
rencontrera un nombreux public pour goûter cet art à la mode
d'autrefois.
La Dette dont il s'agit est celle que payera aux parents adoptifs
que lui a donnés le hasard une jeune fille mêlée sans le vouloir à
un effrayant drame passionnel. Suzanne en effet est surprise par
son tuteur en tête-à-tête avec un jeune homme, dans un pavillon
de chasse écarté; tout l'accuse d'être coupable d'une intrigue galante.
Elle ne se défend pas parce qu'elle n'est venue là que pour
servir d'intermédiaire dans la rupture entre le jeune homme et sa
mère adoptive, la femme de son bienfaiteur.
Elle acceptera tous les outrages et toutes les condamnations
pour ne pas trahir l'une et désespérer l'autre. Il faudra l'intervention
avisée d'un vieil oncle clairvoyant pour faire la lumière
dans cette énigme.
Les auteurs ont ménagé avec une savante habileté l'éclatement
du coup de théâtre avant lequel tout le monde était demeuré
dans l'incertitude du dénouement.
Quand cette pièce émouvante aura été quelque peu remaniée, elle
pourra fournir une belle carrière.
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