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L'avers et le revers

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son joli postérieur, <strong>et</strong> comme autant d’appâts pour gobemouches<br />

tout ce qui en un rien peut affo<strong>le</strong>r un homme. Il s’en<br />

fallut d’un geste que je ne succombe à tant d’invites <strong>et</strong><br />

encouragements, <strong>et</strong> je me demande encore comment ne suis-je<br />

tombé tout rôti dans son bec. Qu’avais-je à y perdre, me direzvous,<br />

sinon peut-être y oublier un peu la Margot, ce qui somme<br />

toute eût été un plus astucieux remède que celui enseigné à la<br />

rude par Faujan<strong>et</strong>. Mais une antique prudence me r<strong>et</strong>int<br />

toujours, car il me sembla que toucher à la fil<strong>le</strong> de la Maligou<br />

eût apporté son lot de désagréments <strong>et</strong> de misères, <strong>et</strong> que peutêtre<br />

j’y aurais joué ma place de val<strong>et</strong> en c<strong>et</strong>te maison. Quand j’y<br />

repense encore maintenant, je suis assuré que j’ai agi là avec<br />

sagesse en ce tourment, <strong>et</strong> pourtant, il m’arrive, certains soirs<br />

de lassitude où la vieil<strong>le</strong>sse insiste sur <strong>le</strong> passé, de <strong>le</strong> regr<strong>et</strong>ter<br />

un peu.<br />

Il me tardait de voir s’achever enfin c<strong>et</strong>te quarantaine que je<br />

trouvais bien sévère, opinant – à tort, je l’appris plus tard – que<br />

<strong>le</strong> mal de lèpre ne pouvait se laisser enfermer dans <strong>le</strong> corps sans<br />

s’y faire reconnaître incontinent par <strong>le</strong>s affreux symptômes que<br />

l’on sait. Mais je n’imaginais guère que l’élargissement de nos<br />

prisonniers volontaires s’accompagnerait, entre <strong>le</strong> baron <strong>et</strong> mon<br />

maître, d’un affrontement tel que la vio<strong>le</strong>nce en ébranla <strong>le</strong>s<br />

murs du château <strong>et</strong> faillit j<strong>et</strong>er mon maître sur <strong>le</strong>s routes du<br />

royaume, sans que je sache bien ce que je serais devenu lors.<br />

Dans ses Mémoires, mon maître a conté c<strong>et</strong>te grande<br />

querel<strong>le</strong> <strong>et</strong> je l’ai évoquée ci-avant déjà, prouvant par là assez<br />

que j’étais céans à Mespech au moment de l’affaire <strong>et</strong> non pas<br />

larronnant encore sur <strong>le</strong>s chemins de misère. Vous savez à coup<br />

sûr, mais je <strong>le</strong> rappel<strong>le</strong> ici pour <strong>le</strong> <strong>le</strong>cteur catholique, que <strong>le</strong>s<br />

huguenots renoncent à toutes images des saints, qu’ils<br />

considèrent comme idolâtres, <strong>et</strong> que parmi toutes ces<br />

représentations interdites, cel<strong>le</strong> de Marie est encore la pire de<br />

toutes. Sur ce point, il n’y a pas lieu de transiger.<br />

Je n’ai pas assisté moi-même à la terrib<strong>le</strong> scène où <strong>le</strong> baron,<br />

découvrant avec horreur que son fils portait au cou une médail<strong>le</strong><br />

de Marie, cel<strong>le</strong> de sa mère qui lui avait fait jurer sur son lit de<br />

mort de la porter toujours, lui ordonna à la fureur tant <strong>et</strong> tant de<br />

la r<strong>et</strong>irer, <strong>et</strong> mon maître s’obstinant à refuser, <strong>le</strong> chassa de<br />

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