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L'avers et le revers

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adhérer, car il me semb<strong>le</strong> que la maturité est un état à vivre<br />

aussi, qu’il a ses avantages, qu’il donne à l’existence une autre<br />

perception, <strong>et</strong> que notre terrestre voyage ne serait point compl<strong>et</strong><br />

si nous n’y goûtions éga<strong>le</strong>ment.<br />

Au reste, il n’y avait pas que <strong>le</strong> so<strong>le</strong>il qui m’importait à c<strong>et</strong>te<br />

époque, car j’avais Margot en tête, <strong>et</strong> vous savez bien, <strong>le</strong>cteur <strong>et</strong><br />

<strong>le</strong>ctrice, que rien n’est plus obsédant que <strong>le</strong> drô<strong>le</strong> ou la drôl<strong>et</strong>te<br />

quand ils s’invitent ainsi en votre pensement <strong>et</strong> désir, <strong>et</strong> qu’il y<br />

faut de grands <strong>et</strong> imminents malheurs pour vous en détourner.<br />

Depuis notre équipée en Sarlat, je n’avais mie revu l’appétente<br />

garce, ou en de si brefs instants, nous croisant seu<strong>le</strong>ment <strong>et</strong><br />

chacun vaquant à sa tâche, que d’une chevauchée inachevée j’en<br />

appelais <strong>le</strong> complément. Un sourire vite entrevu dans un couloir<br />

du château, ou un p<strong>et</strong>it signe de la main donné du potager,<br />

nourrissent l’impatience plus qu’ils ne la calment <strong>et</strong>, comme<br />

vous <strong>le</strong> savez, il est des âges où on peut guère attendre bien<br />

longtemps, sinon à se dérouter de ce qui tarde, jusqu’à lorgner<br />

même sur c<strong>et</strong>te Gavach<strong>et</strong>te qui ne demandait que cela.<br />

Lors donc, je traînais mes guêtres négligemment, faisant ici<br />

<strong>et</strong> là quelques inuti<strong>le</strong>s détours dans <strong>le</strong> seul espoir<br />

d’entrapercevoir Margot derechef, <strong>et</strong> nul<strong>le</strong> part ne la devinai,<br />

quand <strong>le</strong> destin s’en mêla d’une bien significative manière. Me<br />

trouvant à l’inopinée en la sal<strong>le</strong> commune, car à l’aventure mon<br />

maître recevait sa <strong>le</strong>çon d’escrime – mais point ne me souviens<br />

vraiment de ce détail – que Barberine se mit à crier sur ses deux<br />

marmots qui s’accrochaient à sa robe, l’empêchant presque<br />

d’avancer. Cherchant à se dégager, el<strong>le</strong> bouscula <strong>le</strong> p<strong>et</strong>it<br />

Jacquou, <strong>le</strong>quel, tombant à la renverse <strong>le</strong>s pieds contremont,<br />

heurta de la nuque <strong>le</strong>s dal<strong>le</strong>s de la sal<strong>le</strong> <strong>et</strong> se mit à brail<strong>le</strong>r si fort<br />

en sa dou<strong>le</strong>ur que Barberine, laissant tomber <strong>le</strong> paqu<strong>et</strong> de linge<br />

qu’el<strong>le</strong> tenait en main, s’agenouilla à son côtel afin que de <strong>le</strong><br />

conso<strong>le</strong>r. Mais rien n’y fit, <strong>et</strong> <strong>le</strong> p<strong>et</strong>it Jacquou, ayant compris là<br />

que sa mère enfin s’occupait de lui <strong>et</strong> en devinant la raison –<br />

brave pitchoune –, se mit à hucher plus fort encore à en rester<br />

inconsolab<strong>le</strong>. Tant <strong>et</strong> si bien que Barberine, qui ne pouvait être<br />

en même temps au four à linge des maîtres ni au moulin à cris<br />

de son fils, me demanda de porter la pi<strong>le</strong> de vêtements en la<br />

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