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L'avers et le revers

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que je cuide assez que Sauv<strong>et</strong>erre seul entendit c<strong>et</strong>te allusion, <strong>et</strong><br />

encore ne puis-je l’assurer avec certitude, car je ne vis sur ses<br />

traits nul<strong>le</strong> réaction, ni de surprise, ni d’assentiment.<br />

Si je ne craignais de prêter à gausserie, j’assumerais bien<br />

volontiers une part de paternité en c<strong>et</strong>te affaire, car il me plaît à<br />

penser que c<strong>et</strong>te péril<strong>le</strong>use facétie que j’eus de m’introduire en<br />

Mespech à l’aide de mon grappin, <strong>et</strong> par là de franchir avec tant<br />

de facilité c<strong>et</strong>te palissade en bois, n’y est pas pour néant dans la<br />

décision du baron de la remplacer par une plus<br />

impressionnante fortification.<br />

Mais j’anticipe, car après notre première visite à Jonas,<br />

considérant l’amp<strong>le</strong>ur démesurée de la tâche, j’étais très en<br />

doutance que ce mur fut jamais construit, ne sachant pas encore<br />

que <strong>le</strong> baron était de ces hommes qui vont au terme de <strong>le</strong>urs<br />

désirs, <strong>et</strong> ceci avec une implacab<strong>le</strong> ardeur, sans se décourager<br />

aucunement des traverses qui surgissent tant <strong>et</strong> tant <strong>et</strong> qui<br />

affaiblissent la volonté de beaucoup. Non, <strong>le</strong> baron avait une<br />

ferm<strong>et</strong>é en lui qui forçait l’admiration, qu’il a léguée en partage<br />

à son fils <strong>et</strong> que j’ai vue en action en moult occasions, <strong>et</strong> aussi<br />

bien en tant de choses insignifiantes <strong>et</strong> négligeab<strong>le</strong>s, ce qui<br />

prouve assez que là se trouvait <strong>le</strong> ressort de son existence tout<br />

autant que sa joie de vivre.<br />

De triste mémoire sont <strong>le</strong>s jours qui suivirent nos premières<br />

visites à Jonas car ils présageaient de sombres prédicaments en<br />

Mespech où la faucheuse s’en viendrait rendre une de ses<br />

terrib<strong>le</strong>s visites que oncques el<strong>le</strong> n’annonce à son de tromp<strong>et</strong>tes,<br />

comme honteuse de son emploi <strong>et</strong> de son action.<br />

Un matin que derechef je prenais mon déjeuner en<br />

compagnie de la p<strong>et</strong>ite Hélix, je la vis prendre à deux mains sa<br />

jolie tête <strong>et</strong> pousser un cri de dou<strong>le</strong>ur qu’el<strong>le</strong> ne tenta même pas<br />

de réprimer. Comme je l’interrogeais sur <strong>le</strong> mal étrange dont<br />

el<strong>le</strong> m’avait causé quelques semaines auparavant, el<strong>le</strong> eut un<br />

malheureux sourire, la pauvr<strong>et</strong>te, qui ne devinait mie que ce qui<br />

la rongeait était bien l’ultime épreuve dont Dieu la gratifiait. Et<br />

que l’on doive subir pareil pâtiment, qui ressemb<strong>le</strong> fort à un<br />

châtiment, avant que d’al<strong>le</strong>r rejoindre <strong>le</strong> Tout-Puissant en sa<br />

voûte cé<strong>le</strong>ste reste pour moi un bien épais mystère.<br />

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