L'avers et le revers
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Et tout d’une colère feinte, el<strong>le</strong> s’approcha de moi <strong>et</strong> me<br />
bourra <strong>le</strong> ventre de p<strong>et</strong>its coups de poing tout en dévidant <strong>le</strong><br />
même chapel<strong>et</strong> de vexations sur ma prétendue balourdise. Nous<br />
étions face à face mais Margot, ayant tête baissée, ses yeux<br />
évitaient <strong>le</strong>s miens, <strong>et</strong> à la longue, ses doigts se délièrent <strong>et</strong> <strong>le</strong>s<br />
coups de poing se transformèrent en sorte de chatouil<strong>le</strong>ments<br />
qui me firent rire <strong>et</strong> recu<strong>le</strong>r jusqu’à toucher <strong>le</strong> mur où je calai<br />
mon dos.<br />
— Hein, que tu n’es qu’un gros lourdaud ! disait-el<strong>le</strong> entre<br />
ses dents, mi-encolérée mi-rieuse, comme si el<strong>le</strong> me donnait <strong>le</strong><br />
juste châtiment que je méritais.<br />
À la parfin, n’y tenant plus, je saisis ses poign<strong>et</strong>s <strong>et</strong> <strong>le</strong>s<br />
passant autour de ma tail<strong>le</strong>, je la plaquai contre moi. Re<strong>le</strong>vant la<br />
tête <strong>et</strong> me fixant de ses yeux de chatte, étonnée, la bouche<br />
ouverte, el<strong>le</strong> murmura à voix basse :<br />
— Miroul, que fais-tu là ?<br />
Ne répondant mie à c<strong>et</strong>te interrogation, qui ne méritait nul<strong>le</strong><br />
réponse, je posai mes lèvres sur <strong>le</strong>s siennes <strong>et</strong> si je m’attendais à<br />
une rebuffade, ce fut tout <strong>le</strong> rebours, sa langue encontrant la<br />
mienne sans du tout se r<strong>et</strong>enir, <strong>et</strong> même, son corps se serrant<br />
plus fort contre <strong>le</strong> mien. Ah, quel envoûtant baiser que <strong>le</strong><br />
premier, <strong>le</strong> plus désiré, <strong>le</strong> plus intense, <strong>le</strong> plus accompli, qui<br />
vous pénètre jusqu’aux tripes <strong>et</strong> vous soulève en une fébri<strong>le</strong><br />
excitation ! Mais soudain, sans se départir de notre étreinte, el<strong>le</strong><br />
rej<strong>et</strong>a son visage en arrière <strong>et</strong> parut manquer de souff<strong>le</strong>.<br />
— Miroul, nous sommes en la chambre de M. de Sauv<strong>et</strong>erre !<br />
— À Sarlat, il s’en est allé, avec <strong>le</strong> baron…<br />
— À Sarlat ?<br />
Et point ne la laissant réfléchir, sinon à c<strong>et</strong>te heureuse<br />
nouvel<strong>le</strong>, je la pris par la tail<strong>le</strong>, <strong>et</strong> la bousculant quelque peu en<br />
la forçant à recu<strong>le</strong>r, nous tombâmes sur <strong>le</strong> lit au milieu du linge<br />
de Sauv<strong>et</strong>erre. Là encore, je m’attendais à une tendre lutte <strong>et</strong><br />
débattement, mais el<strong>le</strong> devait, tant chaude <strong>et</strong> ardente Margot,<br />
avoir dépassé ce point où la raison domine encore <strong>le</strong> désir. Je<br />
sentis sa main tirer sur ma chemise <strong>et</strong>, passant en dessous, me<br />
parcourir <strong>le</strong>s flancs en une délicieuse caresse, que je ne peux me<br />
souvenir sans frémir ni que renaisse ce suave <strong>et</strong> lointain<br />
émeuvement. Lors je rebroussai sa robe, <strong>et</strong> mes mains glissèrent<br />
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