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L'avers et le revers

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Cause, <strong>et</strong> on ne pouvait mieux trouver comme val<strong>et</strong>, dévoué <strong>et</strong><br />

reconnaissant, pour accompagner <strong>le</strong> fils bien-aimé en la grande<br />

<strong>et</strong> dangereuse vil<strong>le</strong> de Montpellier.<br />

C’est pendant <strong>le</strong> calme trompeur qui suivit la forte<br />

remontrance de Pierre à la Maligou que Barberine, la mère de la<br />

p<strong>et</strong>ite Hélix, entra dans la sal<strong>le</strong> commune, son plus p<strong>et</strong>it dans<br />

<strong>le</strong>s bras <strong>et</strong> <strong>le</strong> dernier accroché à son jupon. Ces deux-là, Ann<strong>et</strong> <strong>et</strong><br />

Jacquou, étaient regardés avec un brin de mélancolie car ils<br />

étaient <strong>le</strong>s deux marmots que la nourrice Barberine s’était fait<br />

faire par son mari pour nourrir <strong>le</strong>s deux derniers enfants, hélas<br />

mort-nés, de la baronne Isabel<strong>le</strong>, laquel<strong>le</strong> décéda des suites de<br />

l’accouchement du second. C’étaient un peu <strong>le</strong>s fantômes des<br />

deux frères ou sœurs que François, Pierre <strong>et</strong> Catherine auraient<br />

dû avoir qui se promenaient avec Barberine <strong>et</strong> dont la simp<strong>le</strong><br />

présence rappelait sans cesse la triste mort de la baronne.<br />

La douce <strong>et</strong> bonne Barberine était une forte femme à la<br />

poitrine opu<strong>le</strong>nte qu’el<strong>le</strong> promenait en avant avec fierté comme<br />

la preuve tangib<strong>le</strong> de son métier de nourrice, tout comme un<br />

bon ouvrier aime à montrer qu’il possède <strong>le</strong>s outils propres à sa<br />

besogne. De nourrice, el<strong>le</strong> était devenue éga<strong>le</strong>ment gouvernante<br />

des enfants de Mespech, à un sol <strong>le</strong> jour, prix fixé par la baronne<br />

Isabel<strong>le</strong>, qui institua c<strong>et</strong>te autre fonction après la mort de son<br />

premier nourrisson afin de conserver Barberine près d’el<strong>le</strong> <strong>et</strong><br />

l’empêcher de r<strong>et</strong>ourner au village chez son mari. Barberine<br />

s’approcha de moi <strong>et</strong> me souhaita la bienvenue au château avec<br />

une gentil<strong>le</strong>sse dont je lui sus gré, <strong>et</strong> j’y repense encore <strong>le</strong>s<br />

larmes aux yeux, alors que la Maligou, à ces quelques mots<br />

accueillants, maugréa dans son coin quelques paro<strong>le</strong>s<br />

inintelligib<strong>le</strong>s, mais à l’évidence hosti<strong>le</strong>s, que Pierre fit cesser<br />

incontinent en se r<strong>et</strong>ournant vers el<strong>le</strong>, <strong>le</strong> sourcil <strong>le</strong>vé.<br />

Quand je revois c<strong>et</strong>te vaste sal<strong>le</strong> commune où je passai tant<br />

de temps avant de quitter Mespech pour Montpellier, <strong>le</strong> cœur<br />

me poigne assez car il y avait là, avec c<strong>et</strong>te grande tab<strong>le</strong> en bois,<br />

ses bancs de chaque côté capab<strong>le</strong>s de réunir ensemb<strong>le</strong> tous <strong>le</strong>s<br />

habitants du château, sans exception d’aucun, <strong>et</strong> l’immense<br />

cheminée avec son cantou où l’on venait souvent s’asseoir pour<br />

se réchauffer un instant au plus dur de l’hiver, une atmosphère<br />

que oncques n’ai r<strong>et</strong>rouvée dans ma vie. Et même la Maligou,<br />

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