27.06.2013 Views

L'avers et le revers

L'avers et le revers

L'avers et le revers

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

hommes <strong>et</strong> femmes, jeunes <strong>et</strong> vieux. Ce joli monde n’était pas<br />

loin de me prendre, tout pareil<strong>le</strong>ment que la Maligou qui menait<br />

la danse en la matière, pour <strong>le</strong> Diab<strong>le</strong> ou l’une de ses créatures<br />

incarnées, tant la fiance dans l’inviolabilité du château était bien<br />

ancrée dans <strong>le</strong>ur tête.<br />

Puis entrèrent, d’une façon moins bruyante <strong>et</strong> désordonnée,<br />

<strong>et</strong> <strong>le</strong>s serviteurs s’effaçant devant eux, François d’abord, <strong>le</strong> frère<br />

aîné de Pierre, long visage fermé <strong>et</strong> imperscrutab<strong>le</strong>, l’allure<br />

digne <strong>et</strong> composée, <strong>et</strong> Samson ensuite, <strong>le</strong>ur demi-frère à tous<br />

deux, jeune garçon d’une rare beauté, mais qui semblait<br />

l’ignorer tant son regard était modeste <strong>et</strong> simp<strong>le</strong> son attitude.<br />

Enfin, <strong>et</strong> c<strong>et</strong>te entrée me remplit d’anxiété, <strong>le</strong> père de Pierre,<br />

<strong>le</strong> baron Jean de Siorac, ayant tout l’air d’avoir été tiré à la<br />

chaude d’une heureuse besogne, <strong>et</strong> deux pas derrière lui, Jean<br />

de Sauv<strong>et</strong>erre, dont je remarquai incontinent la claudication, ce<br />

qui ne l’empêchait nul<strong>le</strong>ment de se mouvoir vite assez, quoique<br />

un peu à la manière d’une sauterel<strong>le</strong> b<strong>le</strong>ssée.<br />

On se souvient que <strong>le</strong> baron, épousant en cela <strong>le</strong> scepticisme<br />

de tous, me demanda de refaire, étape par étape, toutes <strong>le</strong>s<br />

acrobaties qui m’avaient conduit au cœur de la forteresse afin<br />

que de prouver que je ne mentais pas. À mon avis, il n’en<br />

doutait pas vraiment, mais en bon capitaine <strong>et</strong> maître d’œuvre<br />

de la défense du lieu, il souhaitait vérifier de visu que <strong>le</strong> château<br />

possédait une fail<strong>le</strong> à ce point béante qu’il pouvait être investi<br />

par un jeune drôlassou comme moi.<br />

Si, au final, je ne fus pas pendu après c<strong>et</strong>te péril<strong>le</strong>use<br />

démonstration de mes ta<strong>le</strong>nts, je <strong>le</strong> dois à mon sens à trois<br />

raisons qui s’emmêlèrent joyeusement. Tout d’abord,<br />

déterminante entre toutes, l’intervention du fils auprès du père,<br />

contée avec saveur par mon maître dans ses Mémoires <strong>et</strong> où on<br />

peut déjà admirer c<strong>et</strong>te science de la rhétorique que <strong>le</strong> jeune<br />

Siorac aimait fort à manier, au grand plaisir du baron, <strong>et</strong> qui <strong>le</strong><br />

mena jusqu’à la compagnie des plus grands de ce monde.<br />

Ensuite, il est non moins certain que mes ta<strong>le</strong>nts de grimpeur <strong>et</strong><br />

d’apazimeur de chiens, même des plus féroces, portèrent <strong>le</strong><br />

baron à penser que je serais plus uti<strong>le</strong> au service de Mespech <strong>et</strong><br />

de son fils que me balançant tristeusement au bout d’une corde.<br />

57

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!