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L'avers et le revers

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— Margot, à Taniès, oncques n’est allée ce jour-là… conclut<br />

mon maître d’un air sombre. Nous échouons.<br />

Debout au côté de nos montures, tenant <strong>le</strong>s brides en main,<br />

sans nous regarder, il y eut un si<strong>le</strong>nce tant long qu’il me poigna<br />

de désespérance, à peu que <strong>le</strong>s larmes ne viennent s’en mê<strong>le</strong>r<br />

pour achever ma déroute.<br />

— Allons, il faut nous en r<strong>et</strong>ourner ! ajouta mon maître avec<br />

dépit, se hissant sur sa monture. Tel<strong>le</strong> une dernière chance d’en<br />

apprendre davantage, sur <strong>le</strong> sentier, là-haut, nous guiderons<br />

nos montures, deux d’un côté, deux de l’autre, marchant sur une<br />

même ligne, large d’une centaine de pas.<br />

La p<strong>et</strong>ite troupe s’en redescendit dans <strong>le</strong>s Beunes <strong>et</strong><br />

<strong>le</strong>ntement progressa sur <strong>le</strong> large chemin de la vallée, chacun<br />

muré en de tristeuses pensées, <strong>le</strong>s miennes étant assurément <strong>le</strong>s<br />

plus sombres, car se dissipait vers <strong>le</strong> ciel l’espoir ténu que j’avais<br />

jusque-là conservé en mon cœur. Et de la route nous allions<br />

nous écarter pour reprendre <strong>le</strong> sentier du r<strong>et</strong>our quand mon<br />

maître, sans apparente raison, avisant un paysan courbé en son<br />

champ <strong>et</strong> creusant son sillon à la bêche, détourna sa monture <strong>et</strong><br />

s’approcha de lui. Parvenu à la haie, il <strong>le</strong> héla sans rudesse.<br />

— Holà, mon brave ! De quelques renseignements sommes<br />

en nécessité, saurais-tu nous répondre ?<br />

L’homme se redressa <strong>et</strong>, tout esbahi de découvrir face à lui<br />

quatre cavaliers dont deux assez richement vêtus <strong>et</strong> d’un nob<strong>le</strong><br />

maintien, en<strong>le</strong>va incontinent son chapeau à large bord qui <strong>le</strong><br />

protégeait du so<strong>le</strong>il.<br />

— Mais que peux-je savoir, Moussu ? répondit-il.<br />

— Nous cherchons Margot, la connais-tu ?<br />

— La Margot de la Malonie, la fil<strong>le</strong> de Jehan ?<br />

— Oui, la fil<strong>le</strong> de Jehan <strong>et</strong> de Marie. Adonc, comme tous ici,<br />

tu la connais… Et où étais-tu avant-hier, jour du marché au<br />

village ?<br />

— Ici même, Moussu, en même place <strong>et</strong> même labeur !<br />

— Et la Margot, ce jour-là, l’as-tu vue ?<br />

— Oui-da, Moussu.<br />

Est-il besoin, <strong>le</strong>cteur, de vous conter <strong>et</strong> la tension que c<strong>et</strong>te<br />

tant courte réponse répandit parmi nous <strong>et</strong> l’émoi d’apprendre<br />

tout soudain que la Margot n’avait été ni forcée ni occis sur <strong>le</strong><br />

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