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L'avers et le revers

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— Si fait, Moussu Pierre, que je me sens tout ra<strong>le</strong>nti d’avoir<br />

tant bu, <strong>et</strong> que je trouve que <strong>le</strong> Jonas il y va fort sur la chopine !<br />

— Certes, mais quand tu vas considérant son grand corps <strong>et</strong><br />

<strong>le</strong> labeur qui l’occupe <strong>le</strong> jour durant, mon idée est qu’il écluse<br />

tout ça bien vite <strong>et</strong> que ça ne lui fait guère d’eff<strong>et</strong> !<br />

Suant à gouttes <strong>et</strong> bien pressés d’arriver enfin, nous<br />

parvînmes en sal<strong>le</strong> d’escrime où François <strong>et</strong> Samson tiraient<br />

l’un contre l’autre sous la houl<strong>et</strong>te attentive de Cabusse. Dès que<br />

<strong>le</strong> maître d’armes aperçut son dernier élève, il lui fit signe <strong>et</strong>,<br />

marchant à sa rencontre, <strong>le</strong> salua de l’épée d’une fort<br />

majestueuse manière, puis entra en propos :<br />

— Pierre, voilà bien de l’inhabituel chez vous ? Qu’est-ce<br />

donc qui excuse ce r<strong>et</strong>ard ?<br />

Je notai que Cabusse, dont j’ai déjà signalé la grande<br />

familiarité avec <strong>le</strong> baron, laquel<strong>le</strong> contrastait fort avec <strong>le</strong> respect<br />

de Coulondre <strong>et</strong> de feu Marsal, usa du mot excuse qui m’étonna,<br />

même dans la bouche d’un homme qui, sans se soucier de<br />

question de rang ni d’étiqu<strong>et</strong>te, causait à la franche marguerite<br />

avec chacun, <strong>et</strong> je m’apensai qu’il en outrepassait un peu d’en<br />

paraître demander des excuses à mon maître, <strong>et</strong> non pas<br />

seu<strong>le</strong>ment des explications du r<strong>et</strong>ard. Du reste, mon maître ne<br />

prit pas la remontrance tant à la légère <strong>et</strong> d’un sursaut<br />

d’agacement sa réponse fut agrémentée :<br />

— Cabusse, <strong>le</strong> domaine de Mespech est grand <strong>et</strong> sans limite<br />

de temps exige d’être administré, si bien que me voilà en r<strong>et</strong>ard,<br />

certes, mais prêt cependant à en découdre pour peu que vous en<br />

manifestiez <strong>le</strong> désir.<br />

— Je ne faisais que regr<strong>et</strong>ter votre absence, laquel<strong>le</strong> plombe<br />

un peu ma <strong>le</strong>çon, rétorqua Cabusse la crête un tantin<strong>et</strong> rabattue<br />

me sembla-t-il, car mirez donc vos deux frères tirer l’un contre<br />

l’autre, ne dirait-on pas un ball<strong>et</strong> plus qu’un combat ?<br />

Il y avait là flatterie pour se faire pardonner son entrée en<br />

matière, je n’en doute pas, mais el<strong>le</strong> s’appuyait, non sans ruse,<br />

sur une franche <strong>et</strong> solide réalité car François <strong>et</strong> Samson<br />

offraient c<strong>et</strong> ennuyeux spectac<strong>le</strong> dont de causer l’occasion me<br />

fut déjà donnée. Samson avançait, un peu lourdement, sans<br />

jamais chercher à placer la botte décisive, tandis que François<br />

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