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L'avers et le revers

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Prononçant c<strong>et</strong>te dernière paro<strong>le</strong>, <strong>le</strong> baron me fit un clin<br />

d’œil auquel je pris garde de ne point répondre, ne sachant<br />

quel<strong>le</strong> en était la signification, ni s’il s’agissait là d’une allusion,<br />

moi qui oncques de ma vie n’ai touché la Gavach<strong>et</strong>te.<br />

— Enfin, monsieur mon père, vous vous jouez, <strong>et</strong> ne songez<br />

pas réel<strong>le</strong>ment à la Gavach<strong>et</strong>te ? Vous qui avez été marié, <strong>et</strong> êtes<br />

père de quatre enfants ! répondit Pierre affectant l’offusqué.<br />

— Ne la faites point à la chattemite, mon fils, on dirait <strong>le</strong> curé<br />

Pinc<strong>et</strong>tes du village de Marcuays, qui baisse <strong>le</strong>s yeux en messe<br />

pour mieux <strong>le</strong>ver la queue en sacristie !<br />

À ceci, mon maître s’esbouffa tout à p<strong>le</strong>in <strong>et</strong>, pour cela, mit<br />

un moment avant de répondre :<br />

— Certes, mieux vaut de la franchise en ces affaires qu’une<br />

tel<strong>le</strong> sordide hypocrisie ! Pourtant, l’excès n’étant bon à nul<strong>le</strong><br />

chose, je persiste à penser que vous vous titil<strong>le</strong>z avec c<strong>et</strong>te<br />

Gavach<strong>et</strong>te mais que vous n’y songez pas vraiment.<br />

— En eff<strong>et</strong>, mon fils, j’ai en ce moment, avec qui vous savez,<br />

jolis bas-de-chausses à mon pied, <strong>et</strong> n’ai point besoin de c<strong>et</strong>te<br />

enfant. Votre père n’est pas l’ogre que la Maligou imagine !<br />

Et ce disant, il se r<strong>et</strong>ourna vivement, <strong>et</strong> surprit la Maligou<br />

qui s’était rapprochée d’une assez sournoise manière, une<br />

carotte à la main <strong>et</strong> l’ouïe aux agu<strong>et</strong>s.<br />

— Je disais que ta fil<strong>le</strong> était bien mignonn<strong>et</strong>te, la Maligou, <strong>et</strong><br />

qu’il faudra te la surveil<strong>le</strong>r pour non pas qu’el<strong>le</strong> soit engrossée<br />

avant l’âge !<br />

— Mais je la surveil<strong>le</strong>, Moussu lou Baron, je la surveil<strong>le</strong> !<br />

répondit la Maligou en reculant précipitamment vers ses<br />

fourneaux.<br />

Le baron se pencha derechef vers mon maître.<br />

— Mais je ne renonce à rien, a priori, <strong>et</strong> même s’il lui<br />

manque encore quelques p<strong>et</strong>ites années à mon goût, je sais être<br />

patient.<br />

Puis, laissant fi<strong>le</strong>r quelques secondes, il ajouta :<br />

— Le mariage est un lien détestab<strong>le</strong>, Nature nous a fait<br />

toutes pour tous <strong>et</strong> tous pour toutes…<br />

— Voilà une bien étrange maxime ! s’écria mon maître.<br />

— C’est que votre éducation n’est point encore complète,<br />

mon fils. C<strong>et</strong>te étrange maxime, comme vous dites, a déjà plus<br />

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