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L'avers et le revers

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Chapitre V<br />

En mai de l’année 1564, <strong>le</strong> mal de peste qui ravageait Sarlat<br />

s’évacua de la vil<strong>le</strong> sans qu’on puisse en connaître la raison,<br />

sinon que c<strong>et</strong>te désertion fut soudaine, qu’el<strong>le</strong> soulagea <strong>le</strong>s<br />

survivants, <strong>et</strong> permit aux bourgeois aisés ainsi qu’à la hiérarchie<br />

du c<strong>le</strong>rgé <strong>et</strong> de l’État de r<strong>et</strong>ourner enfin en la cité, <strong>et</strong> d’y<br />

reprendre <strong>le</strong>urs quartiers. Le bilan de l’épidémie fut l’un des<br />

plus lourds jamais subis par la vil<strong>le</strong>, <strong>le</strong> tribut payé se comptant<br />

en milliers de morts.<br />

La question de la peste ne se pouvait ignorer même en<br />

Mespech, pourtant isolé de la vil<strong>le</strong> <strong>et</strong> de ses pesti<strong>le</strong>nces, car ce<br />

mal est grandement contagieux <strong>et</strong> <strong>le</strong> moindre quidam infecté<br />

peut, en un souff<strong>le</strong>, recruter pour la faucheuse moult complices<br />

involontaires, qui répandent à <strong>le</strong>ur tour la mort aux a<strong>le</strong>ntours.<br />

C’est pourquoi <strong>le</strong> baron, quand je débarquai au château vers<br />

mars 1563, s’informa au plus tôt d’où j’étais <strong>et</strong> fut fort rassuré<br />

d’apprendre de ce que je venais de Vergt, <strong>le</strong> Périgord vert, <strong>et</strong><br />

non point du côté de Sarlat, <strong>et</strong> autres lieux infects. Nul doute<br />

que j’eusse subi une quarantaine aussi si j’avais traversé <strong>le</strong>s<br />

places contaminées.<br />

À Mespech, il y avait ceux du dedans <strong>et</strong> ceux du dehors, ainsi<br />

appela-t-on, du temps de la peste, ceux qui vivaient en <strong>et</strong> hors<br />

des murs, ceux-ci étant Cabusse <strong>et</strong> sa Jacotte, Coulondre <strong>et</strong> sa<br />

Cathau, Jonas <strong>et</strong> sa Sarrasine, <strong>et</strong> Margot. Jonas était <strong>le</strong> carrier<br />

du domaine, <strong>et</strong> recruté par la frérèche dès avant la naissance de<br />

mon maître, peu de temps après <strong>le</strong>s noces entre Jean de Siorac<br />

<strong>et</strong> Isabel<strong>le</strong> de Caumont. Originaire des Monts d’Auvergne, du<br />

village de Marcolès, carrier de métier, c’était un grand gaillard<br />

barbu, noué de musc<strong>le</strong>s épais <strong>et</strong> qui travaillait dur à extraire <strong>le</strong>s<br />

pierres <strong>et</strong> à <strong>le</strong>s tail<strong>le</strong>r à la demande. Il avait choisi de vivre en la<br />

grotte qui jouxtait la carrière <strong>et</strong> ne rechignait guère à la besogne,<br />

payé deux sols <strong>le</strong> jour, <strong>et</strong> chassant à l’arc <strong>le</strong> gibier dont il<br />

redonnait <strong>le</strong>s trois quarts à la frérèche. En un temps où <strong>le</strong>s<br />

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