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L'avers et le revers

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d’un pas vif <strong>et</strong> décidé, au milieu du chemin <strong>et</strong> en direction de<br />

Mespech, balançant <strong>le</strong>s bras en alternance <strong>et</strong> se déhanchant<br />

fortement, démarche qui lui était naturel<strong>le</strong>, comme je m’en étais<br />

déjà aperçu. De la voir ici, <strong>le</strong> cœur me bondit dans la poitrine<br />

mais ma position de val<strong>et</strong>, derrière mes maîtres, m’obligea à<br />

tenir l’attitude neutre <strong>et</strong> indifférente qui se devait d’être la<br />

mienne en toute circonstance.<br />

— Eh bien, Margot, lui lança mon maître quand el<strong>le</strong> se<br />

trouva à portée de voix, où cours-tu ainsi ? Point ne savais que<br />

tu avais à faire à Mespech ce jour d’hui.<br />

La Margot stoppa devant nos chevaux, j<strong>et</strong>a un franc regard à<br />

nous trois <strong>et</strong> répondit <strong>le</strong>s mains sur <strong>le</strong>s hanches :<br />

— C’est mon père qui m’envoie. Du travail à Mespech, m’a-til<br />

dit, toujours <strong>et</strong> à foison on en trouve ! Va proposer tes<br />

services, a-t-il ajouté, <strong>et</strong> donc je m’en vais voir si<br />

M. de Sauv<strong>et</strong>erre peut lâcher un sol pour une journée de travail.<br />

Sur ce, il y eut un si<strong>le</strong>nce car la rencontre était singulière<br />

assez, nous trois à cheval quittant <strong>le</strong> château comme pour un<br />

grand voyage <strong>et</strong> la Margot, seu<strong>le</strong> au milieu du bois, qui nous<br />

faisait face.<br />

— Et où donc que vous al<strong>le</strong>z, Moussu Pierre, avec votre frère<br />

Samson <strong>et</strong> votre val<strong>et</strong> ? demanda la Margot pour briser ce<br />

si<strong>le</strong>nce.<br />

— À Sarlat, Margot.<br />

— À Sarlat ? Pour un long temps ? reprit-el<strong>le</strong> <strong>et</strong> ses yeux<br />

brillèrent aussitôt du même feu que celui que je lui avais connu<br />

près du potager.<br />

— Pour ce jour seul, Margot, <strong>et</strong> avant la nuit nous rentrerons,<br />

répondit mon maître.<br />

Les garces, quand el<strong>le</strong>s sont jeunes <strong>et</strong> jolies, <strong>et</strong> j’eus fort<br />

souvent l’occasion de <strong>le</strong> vérifier en ma longue existence, ont en<br />

usance un culot que même <strong>le</strong>s grands de ce monde n’ont pas<br />

devant <strong>le</strong> roi, <strong>et</strong> <strong>le</strong>s requêtes insensées qu’el<strong>le</strong>s formu<strong>le</strong>nt parfois<br />

avec <strong>le</strong> plus adorab<strong>le</strong> des sourires peuvent désarçonner <strong>le</strong> plus<br />

pisse-froid des hommes. Et la Margot, en ce prédicament, ne<br />

faillit guère à c<strong>et</strong>te féminine tradition quand el<strong>le</strong> lança à mon<br />

maître sur <strong>le</strong> ton d’une sœur s’adressant à son frère <strong>et</strong> en une<br />

étrange forme de réponse comme si question avait été posée :<br />

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