ARCHIVES BERBÈRES et BULLETIN DE L'INSTITUT DES HAUTES ...

76 J. CAILLÉ:leurs établissements à la garde d'agents indigènes. De plus, il n'y a pasd'autres étrangers que le vice-consul britannique et sa famille.Avec les deux agents anglais qui se succèdent ainsi de 1854 à 1868,Beaumier entretient d'excellents rapports professionnels et cette bonneentente sert utilement le prestige européen. Il rend hommage «aux qualitésde son aimable collègue » Elton, quand celui-ci quitte Rabat, au mois deseptembre 1856. 'Mais, pas plus avec lui qu'avec son successeur, Barrow, iln'entretient de relations suivies en dehors du service. En effet, les Elton,très froids et renfermés; déclinent souvent les invitations. De son côté,Barrow, fils d'un secrétaire 'général de l'Amirauté et frère d'un membre dela Chambre des Lords, est un bon Anglais, très instruit et de bonne compagnie,.mais sa femme paraît extrêmement effacée.Néanmoins, Beaumier donne parfois quelques réceptions, notammentpour la fête nationale de la France qui, sous l'empire, se célèbre le 15 août,jour anniversaire de la naissance de Napoléon 1er. En 1854, c'est un granddîner au consulat, auquel sont conviés M. et Mme Elton, avec leur fils, •un certain capitaine Razouls, commandant le brick le Suffisant-Isidore, depassage dans le port du Bou Regreg et le drogman Narcisse Cotte. Celui-ci,dans une lettre privée au chef de la mission de France à Tanger, CharlesJagerschmidt, donne quelques détails amusants sur la soirée (1).A Mme Beau'mier, le capitaine Razouls offre un pot de terre cuite du Levantet débite un compliment en vers qu'il a calligraphié de son mieux sur « unrouleau de papier colossal, orné de rubans omnicolores }). La femme duconsul a de la' peine à conserver son sérieux en écoutant -le discours ducc brave caboteur, aux gros yeux bleus comme ceux des chiens de.faïencechinois, étouffant de graisse et sifflant au point qu'on aurait pu croire qu'il, avait une locomotive dans l'estomac ». Le repas est excellent; Mme Elton,habillée d'une robe de barège 'amaranthe, se montre cc d'une vivacitéextrêmement juvénile et ljvre un assaut remarquable au vin dechampagne ».La naissance du fils de Napoléon III, survenue à Paris, le 16 mars 1856,est l'occasion d'un autre dîner de cérémonie, auquel assistent les collaborateursde notre vice-consul, de Laroche et Ducors, les capitaines des(1) Cette lettre nous a été obligeamment communiquée par M. Jean Jagerschmidt - le fils de CharlesJAGERSCHlIfiDT - à qui nous sommes heureux d'adresser nos sincères remerciements. Elle est illustrée desdeux dessins que reproduit notre planche II.