ARCHIVES BERBÈRES et BULLETIN DE L'INSTITUT DES HAUTES ...

78du mois de juin 1857, notre vice-consul, sa femme et leur interprète sortentà cheval. Ils se rendent jusqu'à l'embouchure de l'oued Yquem, à vingttroiskilomètres au sud de Rabat, et y contemplent avec curiosité le cadavred'une énorme baleine, rejeté par la mer.Beaumier fait même, toujours accompagné de sa femme, de véritablesexpéditions dans le nord du Maroc. Au mois de novembre 1855, il parcourtla province du Gharb, entre Rabat et Tanger, pendant treize jours. Ilvisite encore la même' région en 1857, en 1863 et, cette dernière année,séjourne même plusieurs semaines à Tétouan. Au cours d'un de ces déplacements,il s'avance jusqu'à quelques heures de marche d'Ouezzane, oùcependant le grand chérif n'ose pas l'accueillir, dans la crainte des réactionsdu makhzen. Les caïds, les cheikhs, les habitapts des douars le reçoiventpartout avec la plus grande amabilité et lui offrent « des montagnes decouscous et des torrents de thé ll. De semblables voyages sont le meilleurmoyen de connaître le pays et ne peuvent avoir que d'heureux résultatspour l'jnfluence française.Quelques autres événements viennent encore rompre l'uniformité del'existence. Le 2 'août 1856, la corvette à vapeur prussienne le Dantzigmouille en rade de Rabat. Le commandant et son état-major descendentà terre et se rendent au vice-consulat de France, où Beaumier les accueilletrès courtoisement. Sur leur demande, il les promène dans la ville, où lessoldats marocains qui les accompagnent doivent leur faire place à grandscoups de bâton pour écarter les curieux. Dans le commandant qui seprésente à lui et dont les vingt officiers se tiennent toujours à distance respectueuse,Beaumier croit deviner le prince Guillaume de Hesse, voyageantincognito. Pendant plusieurs jours, cette visite alimente les conversationset la correspondance du vice-consulat.Quand passent le sultan ou i'un des priilces de sa famille, la ville de Rabats'anime et la population est en effervescence. Toutes les autorités et denombreux habitants vont attendre le souverain aux portes de l'enceinte,tandis que les canons des forts tirent des salves répétées. Beaumier admireles superbes mules sur lesquelles voyagent les femmes du harem impérial,que protège une escorte d'eunuques et de soldats. De plus, il s'amuse devoir que, pour traverser le Bou Regreg, le sultan utilise un petit bateau,bariolé de bleu, de vert et d'ocre imitant l'or, et surmonté à la poupe d'unesorte de cabine en bois peint, recouverte d'étoffe rouge.