Vie de Sénèque - College of Stoic Philosophers

82 l.\ PREMIÈRE CARRIÈRE DE SÉNÈQUE
comme de tous les nouveaux princes, l'idole de la
multitude.
Au fond un sentiment dominait tout en lui : lu
peur 1
. Le souvenir du meurtre auquel il avait dû le
trône le poursuivait. Le sort de son prédécesseur ne
l'atlendait-il pas? Par peur il était doux. poli, res-
pectueux, clément; par peur il exagérait sa bonhomie
naturelle : par peur il se faisait aimer: par peur
il sacrifiait jusqu'à sa dignité. Les circonstances
développaient sa tacheté instinctive. Suétone nous
te montre, dans les commencements de son règne,
ne sortant qu'entouré d'hommes armés, servi à table
par des soldats, faisant tàter et secouer les (ouver-
tures des malades qu'il allait visiter. Il n'osa paraître
.m Sénat que trente jours après son avènement, el
l'on ne cessa jamais de fouiller à sa porte courtisans
et solliciteurs.
Son seul orgueil était de rendre la justice. C'était,
de toutes ses prérogatives, celle qui lui donnait la
plus haute idée de sa puissance, il jugea ;i\ ec passion,
sans relâche, même aux jours de fêtes religieuses,
même le jour des fiançailles de sa fille. Les écrivains
anciens s'accordent à le représenter comme une sorte
de Perrin Dandin impérial, courant aux plaids dès
qu'il peut, rendant du malin au soir des sentences,
>n\ eut fort raisonnables, d'autres Ibis complètement
absurdes, corrigeant la loi selon l'impulsion du mo-
ment, tantôt pour l'adoucir, tantôt pour l'aggraver'.
• Natura
performidolosum (Aurelius Victor, I b*., [V, 7 Nihil
acque quara Limidus ac diffidens fuil Suétone, Claud., 35). Cf. Dion,
I.V 2.
- C'était son droit, l'empereur, quand il jugeait, étant au-dessus
i Ipien,
/'','/. \ l.\ lll. six, 13).