Vie de Sénèque - College of Stoic Philosophers

3Ci' LA RETRAITE DE SÉNÈQ1 E
d'empressement, Néron alla à sa rencontre, la com-
bla de prévenances et d'honneurs, et la mena luimême
à Baules, domaine voisin où elle devait loger.
Le soir, un souper de gala, offert par l'officieux
Othon, attendait la mère et le fils. Un accident, qui
n'était pas fortuit, empêchait Agrippine de s'y rendre
sur la liburnique. Néron vint la chercher sur une
trirème magnifiquement parée : c'était le vaisseau
apprêté par Anicetus. On sut depuis qu'Agrippine
avait eu vent du danger ;
sous un prétexte quelcon-
que, elle préféra faire en litière le trajet de Baules
à Baies. Mais sa méfiance ne dura pas : la manière à
la fois respectueuse et gaie dont elle fut traitée par
son lils, le ton des entretiens, la bonne chère, un
mélange de cordialité et de révérence auquel elle
n'était plus habituée, la tendresse finale des adieux
dissipèrent progressivement ses craintes. Le festin
s'était prolongé jusqu'à une heure avancée. (Juand
Agrippine se retira, la nuit était brillante d'étoiles,
la mer calme et sereine : elle monta sans épouvante
sur le funeste vaisseau. Anicetus l'y suivit et, tenant
sa proie, dirigea la manœuvre 1
Néron attendit des nouvelles, on devine dans quelle
anxiété. 11 était sûr de la fidélité d'Anicetus, ennemi
personnel d'Agrippine et inventeur du stratagème :
il ne doutait pas du succès, mais il avait mille raisons
de l
rem
hier. Lorsqu'on lui annonça enfin que Leschoi
ses avaient mal tourné, que le naufrage n'avait pu
être exécuté dans les conditions prescrites et qu'Agrip-
pine, blessée à peine, s'était évadée à la nage, anéanti
de stupeur et d'effroi, il crut sa dernière heure arri-
» Tacite, Ann., XIV, 4-5; Suétone, Nero, 34; Otho, 3: Dion. LXI,
12-13.
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