Vie de Sénèque - College of Stoic Philosophers

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immenses revenus; qu'il travaillait à développer sa
popularité; qu'il s'en fallait de peu que, par la beauté
de ses jardins et la magnificence de ses villas, il éclip-
sât l'empereur lui-même. On donnait à entendre qu'eu
toutes choses il visait à être le premier : ne préten-
dait-il pas s'arroger toute la gloire de l'éloquence? ne
faisait-il pas des vers avec une abondance insolite
depuis que Néron avait pris le goût de la poésie? Bref,
on ne négligea rien pour exciter soit la convoitise, soit
la jalousie du prince. Sénèque, ajoutait-on, se montre
publiquement hostile aux divertissements de l'empe-
reur, dénigre son talent de conducteur de char, raille
sa voix toutes les fois qu'il chante. Enfin les nou-
veaux amis de Néron lui faisaient honte de sa docilité
: avait-il besoin de ce maître? était-il encore un
enfant? Rien d'illustre ne pouvait se faire dans l'Etat
que le mérite n'en fût attribué à Sénèque :
il était
temps de secouer ce joug, et Néron pouvait se conten-
ter des leçons de ses aïeux '.
Des amis dévoués et loyaux avertirent Sénèque de
ce qui se tramait. Il voyait du reste l'empereur se
refroidir de jour en jour. Il se sentait environné de
soupçons, dont quelques-uns beaucoup trop graves 2
pour ne pas entraîner sa perte. Lapins légère imprudence
pouvait lui être fatale; il était clair que Néron
accueillerai! dorénavant avec faveur tous les rapports
dirigés contre lui. Alors commença pour Sénèque
1
Tacite, Arm ,
XIV. 52.
1 Ils peuvent paraître invraisemblables. Cependant Le bruit courut
après ta mort de Sénèque qu'un parti s'était formé parmi les officiera
du prétoire pour lui donner l'empire (Tacite, Ann., XV. 65). On trouve
encore un écho de ces rumeurs chez Juvénal [Sal., VIII. 211) :
Libéra si dentur populo suffragia quis tam
Perditus al dunitel Senecam preeforre Neroni?