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des <strong>la</strong>cérations du passé 2 . Autrement dit, à travers l’étude d’un certain nombre de discours sur<br />

<strong>la</strong> sorcellerie, dont ceux des guérisseurs et des voyants, nous voulons montrer que cette<br />

croyance présente toujours une interprétation locale du passé. Elle oblige l’étude de <strong>la</strong><br />

croyance à <strong>la</strong> sorcellerie – avec ses composantes proprement modernes – à se mesurer avec<br />

les imbrications entre « durée courte » et « longue durée » (Appadurai, 1996 : 73-74 ; Bayart,<br />

2008 : 14 ; Ginzburg, 1986 : x-xv ; Mbembe, 1990 : 7).<br />

En République centrafricaine 3 , comme ailleurs en Afrique centrale, <strong>la</strong> sorcellerie est<br />

un problème social majeur qui entraîne de nombreux débats et des initiatives de lutte et de<br />

répression. Ces initiatives et débats se produisent dans des milieux divers : entre autres, celui<br />

des guérisseur « tradipraticiens » et de <strong>la</strong> biomédecine, dans les églises, dans les tribunaux et<br />

les prisons, à <strong>la</strong> radio et dans les pages des quotidiens ainsi que dans les vil<strong>la</strong>ges et dans les<br />

cours de quartier. L’articu<strong>la</strong>tion entre ces différentes initiatives et les débats qu’elles<br />

engendrent constitue, en Centrafrique, l’un des aspects éminemment « modernes » de <strong>la</strong><br />

croyance à <strong>la</strong> sorcellerie. Cette articu<strong>la</strong>tion coïncide <strong>la</strong>rgement avec les tentatives<br />

d’institutionnalisation de l’action « anti-sorciers », menées à <strong>la</strong> fois par l’appareil d’État<br />

centrafricain – notamment à travers le traitement juridique des accusations de sorcellerie 4 –<br />

mais aussi par des acteurs marginaux, tels les guérisseurs dont l’action demeure locale. Nos<br />

enquêtes ethnographiques se sont déroulées dans une vaste région centrale du pays, dans un<br />

contexte mixte urbain et rural. Ici, le « marché de <strong>la</strong> guérison » cohabite avec des structures<br />

sanitaires déficitaires voire totalement absentes. Souvent, le recours aux soins traditionnels est<br />

une nécessité. En reprenant une c<strong>la</strong>ssification locale, qui est lourde de conséquences sur<br />

lesquelles il faudra revenir, dans <strong>la</strong> région banda ce marché de <strong>la</strong> guérison est partagé entre les<br />

tradipraticiens dits « herboristes » et les « spiritualistes » : les premiers administrent leurs<br />

soins en s’appuyant sur <strong>la</strong> connaissance de <strong>la</strong> pharmacopée, les deuxièmes fondent leur<br />

autorité et leur pouvoir sur des visions à caractère religieux ou sur des re<strong>la</strong>tions particulières<br />

et personnelles avec des êtres spirituels (sur ce type de c<strong>la</strong>ssifications locales, voir Ashforth,<br />

























































<br />

2 Dans ce contexte, le terme « <strong>la</strong>cération », emprunté à l’anthropologue italien Francesco Remotti (2005 : 31),<br />

renvoie à l’idée de culture comme d’un espace articulé autour de valeurs, de normes, de représentations<br />

partagées. Historiquement, cet espace peut subir des modifications qui agissent sur son tissu moins comme des<br />

pertes (ou des innovations) tout court, et plutôt comme des procédés de « raréfaction », de « privation » et de<br />

« substitution » (ibid. : 32).<br />

3 Par <strong>la</strong> suite nous utiliserons alternativement « République centrafricaine », « Centrafrique » et « RCA ».<br />

4 En République centrafricaine le Code Pénal sanctionne les « Pratiques de char<strong>la</strong>tanisme et de sorcellerie »<br />

(PCS) à travers l’article 162 : « Sera puni d’un emprisonnement de cinq à dix ans et d’une amende de 100.000 à<br />

1.000.000 de francs quiconque se sera livré à des pratiques de char<strong>la</strong>tanisme ou de sorcellerie susceptibles de<br />

troubler l’ordre public ou de porter atteinte aux personnes ou à <strong>la</strong> propriété ou aura participé à l’achat, à <strong>la</strong> vente,<br />

à l’échange ou au don des restes et ossements humains ». L’article 162bis précise que : « Lorsque les pratiques<br />

définies ci-dessus auront occasionné des blessures graves ou des infirmités permanentes, <strong>la</strong> peine sera celle des<br />

travaux forcés à temps. Lorsqu’il en sera résulté <strong>la</strong> mort les auteurs seront punis de <strong>la</strong> peine de mort ».<br />

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