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télécharger la thèse - fasopo

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événements. L’ancien maire de Bambari, interrogé à propos des « méfaits » des personnes<br />

accusées de sorcellerie, fait confiance aux visions de <strong>la</strong> jeune fille et il se dit convaincu de<br />

leur culpabilité. Lorsqu’il essaie de nous expliquer les « signes » à travers lesquels on<br />

reconnaît un sorcier, il hésite à nous fournir des exemples ; il choisit alors de citer une célèbre<br />

émission radio 136 :<br />

« Qu’est-ce qu’ils faisaient les sorciers dans votre quartier ? »<br />

« Ils font leur travail ! Ils détruisent les gens, mangent <strong>la</strong> chair humaine, transformée<br />

évidemment »<br />

« Ils transforment <strong>la</strong> chair humaine… »<br />

« Oui, oui. En votre présence, vous ne pouvez pas voir ça. Quelquefois on vous<br />

présente [on vous offre à manger] des choses que… qui vous dégoûtent ! Mais au<br />

fond, c’est de <strong>la</strong> chair humaine. Tenez ! Si vous aviez écouté « Africa nº 1 », on par<strong>la</strong>it<br />

des sorciers et tout ça tout récemment. Mais vous alliez dire : mais c’est pas possible<br />

ça ! »<br />

Ce qu’il y a de « moderne » dans ce témoignage oral n’est pas – ce<strong>la</strong> va de soi – <strong>la</strong><br />

référence à une émission radio 137 : bien plus importante est <strong>la</strong> tentative de rendre croyable <strong>la</strong><br />

description des sorciers « anthropophages » à travers l’autorité des médias, et ce<strong>la</strong> dans une<br />

situation où il faut répondre aux questions d’un chercheur européen qui – l’on présume – se<br />

montrera « sceptique » 138 . Dans cet extrait d’entretien, plus que <strong>la</strong> référence aux sorciers qui<br />

« détruisent les gens » nous soulignons l’effort pour « affirmer » une vérité face à celle des<br />

























































<br />

136 Il s’agit de « Triangle », l’émission animée par Patrick Nguema Ndong sur Africa nº 1, que l’on peut écouter<br />

dans une <strong>la</strong>rge partie de l’Afrique, en Europe et, en streaming, partout dans le monde. On pourra mesurer<br />

l’influence de cette émission à partir d’un article, entre autres, paru dans le quotidien centrafricain Le Citoyen, le<br />

14 avril 2006, consacré à une affaire de sorcellerie qui se produisit le jour précédent : « Bangui est en passe de se<br />

transformer en Bangos, <strong>la</strong> ville imaginaire, crée par l’imagination fertile de notre confrère Patrick Ngéma-<br />

Ndong, de AFRICA nº 1, ville dans <strong>la</strong>quelle il ne se passe que des choses incroyables et inimaginables au point<br />

de se dire que l’Afrique est vraiment profonde » (article signé par J. C. Zounguéré). Toujours sur Africa nº 1,<br />

l’émission « Africa vie », animée par Bruce Walker Mapoma, aborde régulièrement les thèmes de l’occulte et de<br />

<strong>la</strong> sorcellerie.<br />

137 Cependant, il semble important rappeler qu’à Bambari les quotidiens imprimés à Bangui ne sont pas<br />

disponibles, et il n’y a pas de télévision – sauf dans certaines Missions Catholiques. De temps en temps,<br />

normalement à l’occasion de matchs de football, des téléviseurs sont apprêtés dans les cinémas de <strong>la</strong> ville, là où<br />

quotidiennement on diffuse des films en DVD. À l’époque de cet entretien, Bambari n’était rejointe non plus par<br />

<strong>la</strong> téléphonie portable. Deux appareils fixes desservaient les 40.000 habitants de <strong>la</strong> localité.<br />

138 En juin 2005, M. Frameau, l’un des accusés de sorcellerie dans l’ « affaire » du mois d’avril précèdent, nous<br />

expliquait dans les termes qui suivent le culte que les Banda rendent aux « mânes » (en banda, ngãndro) :<br />

« Quand quelqu’un dort et il voit en songe, ou en rêve, le bonhomme [le défunt] – ça vous arrive même à vous<br />

les B<strong>la</strong>ncs, vous voyez des gens qui sont morts – (…), alors il sort, il dit me wu ngãndro, j’ai vu tel type<br />

vivant [j’ai vu le défunt]! Alors [les gens] viennent, ils parlent : qu’est-ce que <strong>la</strong> conversation qu’il a eue avec ce<br />

ngãndro là ; il <strong>la</strong> raconte et puis on va offrir de quoi sur cet arbre-là, le ngãndro là. Et c’est vrai… je vous dis<br />

que… Je vous raconte une belle histoire, que vous n’allez pas croire, bien sûr, et que c’est vraie ! J’ai raconté ça<br />

à <strong>la</strong> Radio Linga ». La Radio Linga est une radio locale qui diffuse à Bambari.<br />

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