03.07.2013 Views

télécharger la thèse - fasopo

télécharger la thèse - fasopo

télécharger la thèse - fasopo

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

III. Le mythe : Ngako<strong>la</strong>, Tere et Yilingu<br />

Les semalì, nous l’avons vu, vouaient un culte à Ngako<strong>la</strong>. Aujourd’hui, <strong>la</strong> plupart de<br />

nos interlocuteurs définit le semalì comme « <strong>la</strong> religion des Banda », ou « <strong>la</strong> religion de nos<br />

pères/des aïeux ». Ngako<strong>la</strong> est alors assimilé à une divinité 206 , avec d’autres personnages du<br />

« panthéon » banda que nous allons présenter par <strong>la</strong> suite. Cette interprétation locale peut<br />

s’appuyer sur un mythe d’origine du monde attribué aux Manza et aux Banda. L’origine du<br />

mythe demeure inconnue : Vergiat le mentionnait dans les années 30, à partir de ses<br />

recherches dans <strong>la</strong> région oubanguienne. Dans l’ensemble, l’impression est que<br />

l’identification entre le semalì et <strong>la</strong> religion banda se substitue aujourd’hui à une information<br />

inaccessible sur le sens et les fonctions de cette association initiatique et de son culte : il s’agit<br />

donc d’une tradition réinventée qui assume <strong>la</strong> valeur d’une théorie locale sur <strong>la</strong>quelle,<br />

cependant, l’influence de l’entreprise missionnaire catholique – et de ses interprétations de<br />

« <strong>la</strong> tradition » banda – a été décisive.<br />

Dans l’un des mythes recueillis par Vergiat parmi les Manza, il est raconté que<br />

Ngako<strong>la</strong> vivait autrefois sur <strong>la</strong> terre : il hantait <strong>la</strong> brousse près d’un marigot et il demandait<br />

aux hommes qu’on lui apporte à manger. Étant toujours affamé, Ngako<strong>la</strong> révé<strong>la</strong> aux hommes<br />

son secret : « Je peux tuer un individu, couper son corps en menus morceaux, puis,<br />

rassemb<strong>la</strong>nt tous ces débris informes, j’en fait un homme nouveau auquel j’insuffle <strong>la</strong> vie. Je<br />

le rends meilleur et guéri de tous ses maux. Envoyez-moi des gens, je les mangerai et les<br />

vomirai rénovés » (Vergiat, 1981 : 119-120). Mais si on lui envoyait deux hommes, Ngako<strong>la</strong><br />

n’en rendait qu’un et ava<strong>la</strong>it l’autre. Les hommes décidèrent de le tuer, en muti<strong>la</strong>nt son corps.<br />

Ils gardèrent seulement <strong>la</strong> barbe de Ngako<strong>la</strong>, « et si l’on en coupe un brin, il en coule encore<br />

aujourd’hui des gouttelettes de sang » (ibid.) 207 .<br />

Dans un deuxième mythe, que Vergiat avait enregistré parmi les Banda Togbo et que<br />

nous avons relevé dans <strong>la</strong> Ouaka en 2005, Ngako<strong>la</strong> agit avec Tere – le trickster banda – et<br />

Yilingu, qui en l’occurrence assume les fonctions d’un dieu créateur. Dans ce mythe, tandis<br />

que Tere reste sur <strong>la</strong> terre que Yilingu vient de créer, ce dernier et Ngako<strong>la</strong> montent au ciel au<br />

moyen d’une liane. Ici, Yilingu crée des statuettes d’argiles et Ngako<strong>la</strong>, en souff<strong>la</strong>nt sur<br />

chaque statuette, crée <strong>la</strong> vie. Dans <strong>la</strong> succession des événements, Tere rejoint Yilingu au ciel<br />

et il se fait donner des paniers qui contiennent les animaux et les graines des p<strong>la</strong>ntes. En tant<br />

























































<br />

206 Par exemple, selon M. Faustin Rawago, âgé d’une quarantaine d’années, « Le dieu des Banda c’était un dieu<br />

qu’on appe<strong>la</strong>it semalì » (Bambari, le 22 juin 2008).<br />

207 Signalons que c’est dans cette forme que Mircea Eliade mentionnait le mythe de Ngako<strong>la</strong> (in Le sacré et le<br />

profane, Gallimard, Paris, 1965) : l’auteur citait à son tour Ephraïm Andersson, Contribution à l’ethnographie<br />

des Kuta, I, Uppsa<strong>la</strong>, 1953.<br />

167


Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!