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télécharger la thèse - fasopo

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« Je ne faisais pas ça, j’étais encore enfant, moi je refuse ça (...) En ce qui concerne le<br />

bada, ils font <strong>la</strong> chose de bois, ils taillent le bois, ils oignent le bois, tout ça là ils<br />

disent c’est semalì. Tout ça-là, (...) ils fabriquent une petite hutte comme ça, ils <strong>la</strong><br />

fabriquent dans <strong>la</strong> brousse. S’ils tuent un poulet, ils préparent <strong>la</strong> boule en disant que<br />

c’est Ngako<strong>la</strong> qui en a besoin, les grands vont là-bas pour manger ça »<br />

Au vil<strong>la</strong>ge Kada I, Rémy, âgé de 59 ans et originaire de Moruba 387 , revient sur<br />

l’attitude égoïste des semalì, qui mangeaient « en secret » 388 et à l’écart des gens du vil<strong>la</strong>ge :<br />

« Bon, ils allument le feu pour prendre les animaux [ils vont à <strong>la</strong> chasse en allumant<br />

des « feux de brousse »]. Ils disent que c’est le feu de Ngako<strong>la</strong>. Ils tuent beaucoup<br />

d’animaux, mais ils enlèvent seulement le foie. Ils prennent tout ça, ils vont préparer<br />

dans <strong>la</strong> maison dans <strong>la</strong> brousse, <strong>la</strong> maison de Ngako<strong>la</strong>-là (...) Bon, <strong>la</strong> chose qu’ils ont<br />

préparée, ce n’est que les gens qui sont entrées dans le Ngako<strong>la</strong> qui en mangent.<br />

Ngako<strong>la</strong>, tu ne vas pas le voir avec tes yeux. (Ce sont) Les gens qui disent <strong>la</strong> politique<br />

pour manger les choses des autres 389 . Par exemple toi, si tu as chassé une tortue et<br />

qu’ils t’on vu, <strong>la</strong> nuit ils mettent leur main sur le nez [en par<strong>la</strong>nt, Rémy pince son nez<br />

avec une main et avec l’autre il bat sur sa gorge] : « Hein, hein Rémy ! Tu as pris une<br />

tortue ! Donne-<strong>la</strong> à Ngako<strong>la</strong> ! ». On t’appelle avec ton nom (...) Ils crient dans tout le<br />

vil<strong>la</strong>ge. Bon il y a un remède, le remède-là on l’appelle miya nga<strong>la</strong> [le gui de nga<strong>la</strong>,<br />

euphorbiacée, arbre de galerie]. Bon, si tu n’amènes pas <strong>la</strong> tortue [si tu ne l’offres pas<br />

aux semalì], ils le prennent [le miya nga<strong>la</strong>] ils le courbent : alors <strong>la</strong> ma<strong>la</strong>die t’attrape.<br />

Si on le casse, tu meurs. Si on plie ça doucement, et que tu apportes <strong>la</strong> tortue, alors ils<br />

ramènent ça à <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce, il n’y a pas de problème [tu es guéri] »<br />

























































<br />

387<br />

Kada I se trouve sur une ancienne route Bambari-Grimari. Moruba est un gros vil<strong>la</strong>ge, 18 kms au nord de<br />

Baka<strong>la</strong>.<br />

388<br />

En commentant le récit d’initiation de Michel nous avons écrit que souvent on fait allusion aux interdits<br />

alimentaires pour corroborer cette vision stéréotypée des semalì. Ainsi, par exemple, M. Frameau nous disait<br />

que : « Chez nous il ne faut pas manger l’écureuil, l’écureuil qu’on appelle bada en banda, alors c’est là une<br />

chair très succulente ; <strong>la</strong> chair de <strong>la</strong> tortue c’est réservée à Ngako<strong>la</strong>. C’est le Ngako<strong>la</strong> qui doit manger <strong>la</strong> tortue.<br />

C’est le Ngako<strong>la</strong> qui doit manger le gros lézard qu’on appelle scolopendre, c’est <strong>la</strong> famille des caïmans,<br />

crocodiles, très excellent. Tout ça c’est destiné à Ngako<strong>la</strong>. Et les Ngako<strong>la</strong> ce sont les hommes-là, les semalì qui<br />

se cachent là-bas pour manger ces bonnes choses, voilà tout ça » (Bambari, le 14 juin 2005).<br />

389<br />

L’expression « faire (ou dire) <strong>la</strong> politique » signifie « tromper ». Souvent, l’allusion à <strong>la</strong> politique est<br />

délibérée et prégnante : par exemple, M. Jérôme Enji Graken, dont nous venons de citer le témoignage, évoque<br />

<strong>la</strong> figure de Tere, le trickster banda, dans ces termes : « Tere, Tere, toujours Tere dans le discours banda. Qui<br />

est-ce qui sait qui est Tere ? Tere c’est comme quelqu’un très fort, comme dieu, et les gens disent qu’on ne le<br />

voit pas. Tere fait toutes les choses, il a une sorte de pouvoir, comme dieu. À cette heure-là, il a déjà pris son<br />

chemin [il s’en est déjà allé], c’est le chemin de Tere que l’eau prend pour s’en aller. Mais on n’a pas vu Tere<br />

avec les yeux. On dit qu’il y a une trace dans <strong>la</strong> politique, c’est pour ça qu’ils montrent <strong>la</strong> parole de Tere dans <strong>la</strong><br />

politique ». La « trace de Tere » rappelle <strong>la</strong> légende selon <strong>la</strong>quelle il serait impossible de voir Tere, qui disparaît<br />

en <strong>la</strong>issant seulement ses empreintes sur le sol. C’est certainement à cette empreinte que les informateurs de<br />

Tamara Giles-Vernick font référence en l’associant, cependant, à Caïn et non pas à Tere : « The hunters with<br />

whom I visited Madoungou, for instance, told me of a <strong>la</strong>teritic area in the distant bush that contained a single<br />

human footprint. The footprint was that of Cain, who spent his life as a “restless wandered on the earth” for<br />

killing his brother » (1996 : 267). Ce rapprochement entre Tere et Caïn mériterait des recherches plus<br />

approfondies.<br />

261


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