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manderœ banda qu’on pourrait « opter » pour <strong>la</strong> sorcellerie – les connaissances des aïeux, et<br />

notamment celles des initiés au cultes « secrets » comme les semalì, n’ont pas été transmises<br />

d’une génération à l’autre. Le « totem » dont le Directeur se p<strong>la</strong>ignait à Baka<strong>la</strong> est en effet<br />

l’ensemble des ayo – ceux de « Ngako<strong>la</strong>-là » en premier lieu – qui auraient pu être exploités<br />

de façon socialement constructive. Or, le contraire s’est avéré : les ayo sont devenus les<br />

fétiches utilisés par les sorciers pour satisfaire leur égoïsme et leur avidité. Comme Ferguson<br />

a écrit, nous ne sommes pas ici face à une manque (<strong>la</strong>ck), mais à une perte (loss). Cette<br />

théorie banda de <strong>la</strong> sorcellerie est en même temps une récrimination et une <strong>la</strong>mentation : elle<br />

est un discours de dépossession. Comme nous avons écrit – en reprenant les commentaires de<br />

Giorgio Agamben à une citation d’Aristote (Métaphysique, 1004a, 16) – <strong>la</strong> privation se<br />

distingue de l’absence, parce qu’elle renvoie à <strong>la</strong> forme dont il y a privation, qui s’éprouve par<br />

son manque même (Agamben, 2008 : 79 ; lire aussi Ferguson, 2008 : 10).<br />

Le discours des Banda sur <strong>la</strong> sorcellerie n’exprime pas seulement un manque ou une<br />

différence qui se définissent par rapport aux outside and beyond réfléchis dans le miroir<br />

postcolonial. Ce discours dénonce aussi une trajectoire historique de dépossession qui aurait<br />

privé <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion des instruments pour rivaliser avec les B<strong>la</strong>ncs – « the ambivalent world of<br />

the ‘not quite/not white’ » (Bhabha, 2004 : 131) – et qui, simultanément, aurait perverti <strong>la</strong><br />

réversibilité des connaissances banda, en faisant des ayo des instruments au service des<br />

desseins des sorciers.<br />

En conclusion, nous estimons que <strong>la</strong> « richesse » des aïeux, le « totem » (dont « <strong>la</strong><br />

transmission à un descendant (...) ça ne se fait même pas ! »), <strong>la</strong> manderœ banda et les<br />

« potentialités du milieu banda » doivent être appréhendées comme autant de formules pour<br />

se référer aux ayo banda – ici dans une ample acception comme celle suggérée à plusieurs<br />

reprises par W. Eggen. Ainsi, l’eyiayo (mais aujourd’hui on dira en sango : <strong>la</strong> personne qui<br />

connaît et qui utilise des yoro) fonde son autorité sur des qualités personnelles « d’ordre<br />

religieux et moral » (1976 : 45/d) représentées matériellement par <strong>la</strong> possession ou le<br />

maniement des « fétiches ». Dans l’interprétation de nos interlocuteurs, <strong>la</strong> distance<br />

(disconnection) qui sépare l’époque à <strong>la</strong>quelle Eggen se référait d’un côté, et le temps présent<br />

de l’autre, se mesure à partir de <strong>la</strong> perversion de ces qualités. Plus précisément, on peut parler<br />

d’une « rupture » de <strong>la</strong> réversibilité, ce qui aurait fait des ayo des instruments dans les mains<br />

des sorciers – de plus en plus nombreux –, tandis que <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion, exception faite pour les<br />

quelques tradipraticiens toujours suspectés de connivence avec le monde de <strong>la</strong> sorcellerie, se<br />

perçoit dépossédée de ces mêmes qualités et de ces « richesses ».<br />

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