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« Bon, rœ c’est le dieu principal de Yilingu. Yilingu à <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce de rœ »<br />

La phrase banda que nous avons proposée à notre interlocuteur est une formule de<br />

vœux, l’une des premières que nous avons apprises en banda. De plus, elle est sans doute<br />

l’une des phrases que « le mieux doué des internes » récita au Père Tisserant en lui proposant<br />

de traduire dieu « Eré, presque Héré » 231 . Dès lors, le religieux français s’attacha à distinguer<br />

entre le mot rœ, qu’il traduisit « chose » (1931 : 384-385) et ere « pf. Erœ, rœ ; <strong>la</strong> finale du<br />

ton bas rend ce mot différent du mot rœ, chose, qui est du ton moyen ; on le rencontre dans<br />

les phrases Ere yi mo, Rœ yi mo, Dieu m’aime, j’ai de <strong>la</strong> chance (...) Rœ tõngo ere te ze<br />

gboro ! que Dieu te comble ! te protège (...) ; v. aussi à Yilingu » (ibid. : 118). La phrase en<br />

question, en effet, se traduit comme il suit : rœ (chose/dieu) to (préparer/piler) ngwaroe (<strong>la</strong><br />

pâte huileuse) te ze (pour toi). France Cloarec-Heiss écrit qu’en banda le lexème rœ est très<br />

fréquent (1986 : 208) : ainsi, « <strong>la</strong> valeur d’inanimé [singulier] sera nécessairement conférée<br />

par le lexème èrè « chose » (ibid. : 246), et « l’expression d’un agent inanimé, qui n’est défini<br />

que par son action (« ce qui ») est rendu par le lexème èrè « chose » posé comme antécédent<br />

de <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tive » (ibid. : 247). Finalement, l’intuition du Père Tisserant s’avère correcte, même<br />

si Eggen précise qu’il n’y a aucune distinction de ton dans le mot rœ et il cite de nombreux<br />

exemples pour montrer que les fluctuations sémantiques de ce terme l’approchent aux<br />

observations de Lévi-Strauss sur <strong>la</strong> valeur symbolique zero de <strong>la</strong> notion de mana : « rœ 232 , à<br />

l’encontre de mana, est toujours employé comme nominal et jamais comme verbe ou comme<br />

adjectif. Il désigne une réalité pour <strong>la</strong>quelle il n’existe aucun signifiant, mais qui n’est pas<br />

sans signification » (1976 : 50/d).<br />

Nous ne nous attardons pas ici sur <strong>la</strong> discussion de ce principe – avec « valeur<br />

symbolique zéro » – qui soutient <strong>la</strong> réalité, et ce<strong>la</strong> dans de nombreux contextes au delà de<br />

l’Afrique. Limitons-nous à ce qui suit : rœ est moins une entité transcendante, une « force<br />

vitale » et panthéiste, qu’un principe qui « tient ensemble » <strong>la</strong> réalité sociale en <strong>la</strong> renforçant.<br />

C’est dans ce sens que Eggen cite le fait que parfois le mot rœ « est utilisé comme<br />

euphémisme pour les notions de ma<strong>la</strong>die (kobà), de sorcellerie (ondrò) et de magie (ayo 233 ) » ;<br />

(...) Si rœ dépasse l’ordre existant, il ne s’y oppose que pour le renforcer et le corroborer. Ce<br />

























































<br />

231 Le c<strong>la</strong>n et <strong>la</strong> religion, ibid.<br />

232 Wiel Eggen écrit &r& ; pour faciliter <strong>la</strong> lecture dans les passages cités nous maintenons notre graphie.<br />

233 Nous écrivons ayo.<br />

181


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