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Le premier de ces trois pouvoirs désigne une danse que <strong>la</strong> « personne de baga » 478<br />

exécuterait nue, <strong>la</strong> nuit, devant <strong>la</strong> maison de sa victime. La personne pratiquant le baga serait<br />

reconnaissable aussi du fait d’avoir du feu qui sort de l’anus 479 . La victime du baga tomberait<br />

ainsi dans un état de prostration chaque jour plus grave, jusqu’à <strong>la</strong> mort. On dit parfois que le<br />

baga « fatigue » sa victime qui, étant réveillée chaque nuit par les bruits de <strong>la</strong> danse et <strong>la</strong><br />

lumière des feux, ne peut reposer : d’ici <strong>la</strong> prostration et <strong>la</strong> fatigue extrême que <strong>la</strong> victime<br />

interprète comme l’effet de cette danse « mystique » 480 . La croyance actuelle est certainement<br />

l’évolution d’une croyance plus ancienne dont nous retrouvons <strong>la</strong> trace dans le détail de <strong>la</strong><br />

danse nocturne 481 : en 1931, le Père Tisserant écrivait que parmi les Banda Togbo le baga<br />

désigne un « génie, on l’invoque pour nuire à autrui ; sa représentation, son fétiche, est un<br />

bois enduit de bois rouge, avec un cauri attaché en collier vers son sommet ; on l’installe <strong>la</strong><br />

nuit dans <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ntation de <strong>la</strong> victime, en dansant, les fesses enduites de cendres, et en<br />

chantant : baga, baga, uru ! » (1931 : 48-49). La nudité des danseurs était citée par le Père<br />

Daigre aussi (1931-32 : 689) : probablement, le détail des « fesses enduites de cendres »<br />

revient dans l’idée – aujourd’hui <strong>la</strong>rgement diffusée dans toute <strong>la</strong> Centrafrique – que les<br />

sorciers auraient le « feu à l’anus » 482 .<br />

























































<br />

478<br />

En français et en sango (zô ti baga), l’expression désigne <strong>la</strong> personne qui posséderait ce pouvoir mystique et<br />

qui effectuerait <strong>la</strong> danse homonyme.<br />

479<br />

Les illustrations 33 et 34 représentent deux toiles d’artistes centrafricains. Nous avons pris ces photographies<br />

lors d’une exposition organisée à l’Alliance Française de Bangui en 2006. L’origine de cette image – le feu qui<br />

sort de l’anus des sorciers – demeure inconnue : nous avançons une hypo<strong>thèse</strong> dans ce même paragraphe à partir<br />

des documents des Pères Tisserant et Daigre. Heike Behrend a enregistré une conception simi<strong>la</strong>ire en Ouganda<br />

parmi les Acholi. Ici, le « Jok peut être traduit par esprit, puissance ou pouvoir. (...) Jok (...) peut prendre<br />

possession aussi bien des hommes que des bêtes ou des choses » ; « Pendant <strong>la</strong> Deuxième Guerre Mondiale,<br />

alors qu’un grand nombre de l’Acholi doivent se battre aux côtés de <strong>la</strong> Grande Bretagne en Birmanie, Cey<strong>la</strong>n ou<br />

en d’autres lieux (...) arrive en Acholi Jok Abiba, un jok prenant <strong>la</strong> forme d’un dragon, survo<strong>la</strong>nt les têtes de ses<br />

victimes (...) il suce aussi leurs intestins, provoquant des diarrhées. De l’anus du jok sortent des boules de feu.<br />

L’origine de cette image pourrait s’expliquer par <strong>la</strong> vision des avions ennemis jetant leur bombes » (1997 : 163,<br />

168).<br />

480<br />

Le jeune L. M., âgé de quinze ans, élève à l’école Lapago de Bambari, écrit que le zô ti likundu « lorsqu’il<br />

veut aller manger une personne, il se déshabille ; il se <strong>la</strong>ve avec l’eau d’un fétiche [lô suku<strong>la</strong> tèrè ti lô na ngu ti<br />

yoro ni], il prend ses enfants pour aller manger les personnes. Tu vois qu’il a un feu allumé entre ses fesses. Tu<br />

vois qu’il est en train de marcher derrière <strong>la</strong> maison. Il entre [dans <strong>la</strong> maison], il danse longtemps, il sort. Il prend<br />

ton foie, il s’en va avec ça. Après, tu meurs » (Bambari, le 6 juin 2006).<br />

481<br />

Nous avons fait allusion plus haut à une différence entre ces trois pouvoirs : diversement du paka et du kifi, le<br />

baga est plus c<strong>la</strong>irement négatif et anti-social. Selon M. Victor Madayeka (à Bambari, le 13 avril 2007), õndro et<br />

baga « ne sont pas bien », et « les gens de baga » sont hypocrites, méchantes, jalouses, comme les sorciers.<br />

Cependant les deux se distinguent parce que le baga serait plus un « envoûtement ». Une certaine confusion est<br />

présente aussi dans <strong>la</strong> croyance que les zô ti baga se retrouveraient nues, <strong>la</strong> nuit, sur <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce du marché.<br />

Typiquement, lorsque nous demandions comment on pourrait voir les sorciers, on nous conseil<strong>la</strong>it de nous<br />

déshabiller et d’attendre, nus, au marché. Déjà Wiel Eggen signa<strong>la</strong>it que parmi les Banda <strong>la</strong> nudité totale est<br />

censée protéger celui qui voyage <strong>la</strong> nuit des attaques des sorciers (1976 : 51/d).<br />

482<br />

Daigre c<strong>la</strong>ssait le Gbaga parmi les « fétiches vengeurs » : « Le Gbaga est un fétiche à forme humaine<br />

grossièrement taillé. Ses adeptes forment une société secrète dans <strong>la</strong>quelle on entre après une courte initiation.<br />

Dans leurs réunions où ils sont les seuls admis, ils invoquent le fétiche pour nuire à leurs ennemis et pour appeler<br />

le gibier (...) Le Gbaga a une danse rituelle à <strong>la</strong>quelle les affiliés prennent part entièrement nus et les fesses<br />

recouvertes de cendre » (1931-32 : 689). Une description simi<strong>la</strong>ire apparaît aussi dans le « Vocabu<strong>la</strong>ire Français-<br />

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