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sango) dans <strong>la</strong> mesure où l’oracle par frottement était consulté lors d’un malheur ou pour<br />

détecter l’origine d’une ma<strong>la</strong>die. La description que Félix Éboué nous a <strong>la</strong>issé du « maître »<br />

du bada est donc particulièrement précieuse, et elle complète les observations<br />

ethnographiques de Tisserant et de Vergiat. Cependant, une précision importante s’impose.<br />

Les témoignages et les documents que nous avons cités démontrent que – à l’instar<br />

d’autres associations initiatiques centrafricaines – le semalì intervenait dans <strong>la</strong> communauté<br />

comme une sorte de « police judiciaire » au sens que lui donne Philippe Laburthe-Tolra<br />

(1985 : 352), d’une institution qui jugeait et exécutait ses victimes, non sans susciter <strong>la</strong> crainte<br />

parmi <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion à cause de ses aspects cruels et terrifiants. En outre, les ayo de Ngako<strong>la</strong><br />

étaient recherchés comme une protection contre les malheurs, et les ma<strong>la</strong>des étaient initiés à<br />

l’esprit pour obtenir leur guérison. Du fait que parmi les Banda <strong>la</strong> sorcellerie était (et<br />

demeure) le cadre explicatif privilégié de <strong>la</strong> ma<strong>la</strong>die et du malheur, nous pouvons supposer<br />

que les initiés à Ngako<strong>la</strong> et leurs connaissances « secrètes » étaient sollicités lors des affaires<br />

de sorcellerie aussi – et que, donc, le « tribunal jugeant sans appel » (Éboué, 1931) exerçait<br />

les fonctions d’une « inquisition » locale 343 . Or, précisons ici que sur le terrain nous n’avons<br />

jamais entendu parler du semalì dans ces termes. Autrement dit, nous ne pouvons pas<br />

attribuer à ce culte une fonction expressément répressive et anti-sorcellerie comme celle que<br />

Labuthe-Tolra a décrit pour le culte ngi au Cameroun (ibid. : 351-367). Le rapport entre le<br />

semalì et <strong>la</strong> sorcellerie – ici conçue comme <strong>la</strong> cause présumée des malheurs et des ma<strong>la</strong>dies –<br />

doit être appréhendé à partir des plus vastes fonctions thérapeutiques rattachées à l’initiation<br />

et aux ayo semalì, et des fonctions judiciaires exercées dans l’enclos de Ngako<strong>la</strong>. Ces<br />

fonctions étant particulièrement ambiguës, et des intérêts personnels ayant certainement<br />

entrainé des abus dans l’administration de <strong>la</strong> justice des gbangaυa (voir le cas de Gérélenji<br />

cité par Tisserant, mais aussi les remarques d’Eggen, 1976 : 11/h), le culte lui-même apparaît<br />

marqué par une ambivalence profonde, celle même que nous avons analysé dans <strong>la</strong> figure de<br />

Ngako<strong>la</strong>. Nous verrons dans le prochain chapitre qu’aujourd’hui le culte et ses initiés font<br />

l’objet d’une réinterprétation dans l’« idiome de <strong>la</strong> sorcellerie » : il sera donc nécessaire<br />

d’interroger les raisons qui amènent les Banda à proposer ce rapprochement entre <strong>la</strong><br />

sorcellerie et les anciens cultes initiatiques.<br />

























































<br />

343 Le terme « inquisition » – ainsi que « police judiciaire » – est utilisé par Philippe Laburthe-Tolra à propos du<br />

culte ngi des Bëti du Cameroun. Pour les raisons que nous sommes en trains d’illustrer, un rapprochement entre<br />

le semalì et des cultes plus explicitement anti-sorcellerie est improposable, du moins sur <strong>la</strong> base de nos<br />

recherches et renseignements. Laburthe-Tolra écrit : « Le ngi est une association qui confère à ses membres une<br />

efficacité réputée absolue contre les méfaits de l’evù, avec le pouvoir d’en neutraliser les attaques sous toutes les<br />

formes possibles, y compris en démasquant et en châtiant ou en tuant les sorciers. L’initiation tend donc à rendre<br />

le candidat inexorable et cruel, inaccessible à tout sentiment de pitié et redoutable » (1985 : 353).<br />

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