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jeune fille avait alors vu Michel M. et elle l’avait immédiatement accusé de sorcellerie. Cette<br />

pratique – « ouvrir les yeux » – est communément appelée « vaccination » 581 et elle est<br />

pratiquée avec les « antì », les poudres dont les nganga connaissent les composants végétaux<br />

et leur préparation 582 . Ce n’est que cette poudre qui pourrait « ouvrir les yeux » d’un ma<strong>la</strong>de<br />

et lui montrer le visage de <strong>la</strong> personne qui l’aurait envoûté : <strong>la</strong> prière aussi pourrait interagir<br />

avec cette capacité de « vision ». À l’Église Évangélique d’Ippy, en 2006, un « pasteur<br />

ancien » nous a présenté une femme qui « était comme folle, mais maintenant elle est<br />

docile » 583 : les membres de l’Église ont prié longuement à côté d’elle (dans un premier temps<br />

en <strong>la</strong> liant) pour qu’elle soit libérée des esprits qui hantaient son corps. « Elle était dans le<br />

coma, elle ne par<strong>la</strong>it plus. Nous sommes allés là, on prie, on loue le Seigneur, cette personne<br />

ouvre les yeux, <strong>la</strong> pupille réapparaît, elle a expliqué comment elle a été attaquée » (nous<br />

soulignons).<br />

« Ouvrir les yeux » est une expression répandue dans de différents contextes de <strong>la</strong><br />

guérison en Afrique équatoriale, qui évoque le don de <strong>la</strong> « voyance » attribué au devins-<br />

guérisseurs, les nganga (Mary, 2009 : 19 ; de Rosny, 1981 : 293-ss).<br />

Pourtant, un autre élément moins évident retient notre attention : il s’agit d’une brève<br />

note d’A. M. Vergiat incluse dans Les rites secrets des primitifs de l’Oubangui. Lorsqu’il<br />

décrit <strong>la</strong> conclusion d’une initiation semalì, Vergiat s’arrête sur les gestes des uya – l’un des<br />

noms avec lesquels les initiateurs à Ngako<strong>la</strong> étaient appelés 584 . Il s’agit d’un des passages où<br />

cet auteur ne précise pas s’il rapporte des faits dont il a seulement entendu parler ou auxquels<br />

il a pu assister personnellement 585 . L’initiateur donne des « médicaments » aux initiés à<br />

Ngako<strong>la</strong> (1981 : 150). Quelques jours avant <strong>la</strong> fin de l’initiation, il leur offre un grain<br />

























































<br />

581 Dans le vocabu<strong>la</strong>ire de <strong>la</strong> sorcellerie, le terme « vaccination » s’applique tant aux pratique de protection<br />

« préventives », qu’aux remèdes auxquels ont fait recours une fois que les symptômes de l’ensorcellement se<br />

sont déjà manifestés.<br />

582 Ces « antì » n’agissent que dans <strong>la</strong> guérison et pour « ouvrir les yeux » d’un ma<strong>la</strong>de. À Kouango, le long de<br />

l’Oubangui, le tradipraticien Maurice Anji nous a montré un document du Ministère de Santé Publique et de <strong>la</strong><br />

Popu<strong>la</strong>tion qui atteste son droit à exercer <strong>la</strong> médecine traditionnelle. Maurice Anji nous a expliqué que grâce à<br />

ses compétences il est capable de reconnaître les sorciers et il peut les « bloquer ». Dieu peut faire tomber<br />

ma<strong>la</strong>de une personne qui est sorcière : elle se rendra donc chez Maurice pour être guérie, mais lui il s’apercevra<br />

d’avoir en face un sorcier. Il proposera des soins, et il en profitera pour « vacciner » ce sorcier avec ses poudres :<br />

« Voilà, si je lui fais ça, <strong>la</strong> nuit quand il veut se rendre pour dévorer les gens, maintenant il ne peut pas. Il ne peut<br />

pas bouger. Bon, là il rentre chez lui, il a perdu ce travail, il ne peut plus maintenant métamorphoser les gens »<br />

(Kouango, le 26 mars 2006).<br />

583 À Ippy, le 13 mai 2006.<br />

584 L’uya est le nom banda de l’engoulevent. Cet animal jouait un rôle important dans le complexe symbolisme<br />

du semalì : des représentations de l’oiseau apparaissaient dans le bada. Vergiat avait pu voir ces objets, qu’il a<br />

dessinés et qu’il définissait « fétiches des “ouyas” dans le bada » (voir aussi, 1981 : 60). Tisserant écrivait wuya<br />

(oiseau crépuscu<strong>la</strong>ire, engoulevent), mais il signa<strong>la</strong>it aussi que dans le dialecte banda linda les wuya étaient des<br />

« esprits, à qui on rend un culte ; les linda sifflent dans [des] fruits pour imiter leurs cris » (1931 : 478-479).<br />

585 Rappelons que cet auteur eut accès à des bada de Ngako<strong>la</strong>, et qu’il fut lui-même initié au semalì (Vergiat,<br />

1981 : 12).<br />

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