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Note de l'autour

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limite. Le soleil n’était qu’un point brillant au milieu du vert,<br />

une fois <strong>de</strong> temps en temps. J’ignorais tout <strong>de</strong>s événements.<br />

Et je rêvais que je n’étais pas seul sur le chemin. Je rêvais que<br />

quelqu’un voyageait avec moi, quelqu’un à qui je parlais<br />

doucement et j’exposais toute la sagesse <strong>de</strong> mon esprit enfiévré.<br />

Je rêvais que je tenais un enfant dans mes bras, que j’étais père<br />

et que, contrairement au mien, je ne déshériterais pas mon fils<br />

le plus digne pour un crime sur lequel il n’avait aucune prise. Je<br />

rêvais, et un jour j’essayai <strong>de</strong> poser l’enfant pour boire.<br />

Mais il refusa <strong>de</strong> quitter mes bras et, progressivement, alors<br />

que je m’efforçais <strong>de</strong> le repousser, je me rendis compte que les<br />

oiseaux chantaient, que le soleil brillait, que la sueur coulait <strong>de</strong><br />

mon menton et que je ne dormais pas.<br />

Le gosse gémissait.<br />

Le gosse était réel.<br />

Je me souvins alors qu’il avait hurlé <strong>de</strong> faim. Je me souvins<br />

avoir chanté pour lui dans mon délire tout en marchant, avoir<br />

dormi serré contre lui. Tout cela était très clair – mais d’où<br />

venait-il ?<br />

Je n’eus pas à chercher longtemps. Nous étions reliés à la<br />

taille par un pont <strong>de</strong> chair, par les tripes. Il avait dû se nourrir<br />

<strong>de</strong>s forces qu’il parvenait à tirer <strong>de</strong> moi. Ses jambes pendaient à<br />

une trentaine <strong>de</strong> centimètres du sol quand je me tenais <strong>de</strong>bout,<br />

sa tête était à peine plus bas que la mienne. Et, en le regardant<br />

dans les yeux, je reconnus les miens.<br />

Régénérant radical. Je pouvais guérir n’importe quelle partie<br />

<strong>de</strong> mon corps. Et quand la moitié <strong>de</strong> mes tripes avait été<br />

arrachée, ne restant attachée que par veines et artères, celui-ci<br />

n’avait pas su déci<strong>de</strong>r quel était le véritable moi, quelle partie <strong>de</strong><br />

mon être guérir. Il avait donc soigné les <strong>de</strong>ux, et j’avais plongé<br />

mon regard dans celui <strong>de</strong> mon double parfait, qui me souriait<br />

timi<strong>de</strong>ment comme un enfant bête mais doux.<br />

Non, pas un enfant. Il avait grandi vite, et un léger duvet sur<br />

les joues et autour <strong>de</strong>s lèvres évoquait l’adolescence proche. Il<br />

était maigre : il crevait <strong>de</strong> faim et ses côtes nues saillaient. Les<br />

miennes aussi. Ne sachant pas lequel <strong>de</strong> nous <strong>de</strong>ux sauver, mon<br />

corps avait puisé dans ses réserves pour lui donner <strong>de</strong>s forces et<br />

luttait désormais pour atteindre un équilibre.<br />

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