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Je me réveillai dans le noir. Je n’avais pas vu la nuit à Ku<br />
Kuei lors <strong>de</strong> mon premier voyage, et la nuit précé<strong>de</strong>nte, avec<br />
l’armée, j’avais d’autres soucis. Cette fois, je regardai le ciel.<br />
Dissi<strong>de</strong>nce et Liberté s’étaient toutes <strong>de</strong>ux levées, et à cette<br />
époque <strong>de</strong> l’année, elles étaient très proches l’une <strong>de</strong> l’autre.<br />
J’étais allongé là, encore ensommeillé, laissant mon esprit<br />
vagabon<strong>de</strong>r, quand il m’apparut qu’à ce sta<strong>de</strong> Dissi<strong>de</strong>nce aurait<br />
déjà dû dépasser Liberté.<br />
Pourtant, il n’y avait pas eu <strong>de</strong> mouvement détectable.<br />
Les Ku Kuei auraient-ils donc trouvé le moyen <strong>de</strong> ralentir le<br />
soleil et les lunes ? Non, ou nous aurions observé ces<br />
phénomènes <strong>de</strong>puis Mueller également. Ce qui se passait n’était<br />
pas réel, il s’agissait d’une illusion, une manifestation locale et<br />
non une modification <strong>de</strong> la terre ou du ciel. Cela ne pouvait être<br />
qu’un changement qui nous affectait, nous. Un changement qui<br />
ne s’était pas produit quand l’armée se trouvait avec nous. Un<br />
changement qui ne se produisait que quand nous étions seuls.<br />
« Pour une fois, Dissi<strong>de</strong>nce a compris où était sa place »,<br />
lança Père. Il était donc réveillé.<br />
« Tu as remarqué, toi aussi.<br />
— Je déteste cette forêt, Lanik. » Il soupira. « Un mendiant<br />
ne crache sur aucune pièce, mais je commence à me dire que<br />
j’aurais été mieux avec Harkint.<br />
— Jusqu’à un certain point, sans doute, oui.<br />
— Lequel ?<br />
— Celui où ils t’auraient coupé la tête et elle n’aurait pas<br />
repoussé.<br />
— C’est le problème avec nous autres Mueller, dit Père. Nous<br />
n’arrivons pas à croire que la mort est permanente. J’ai entendu<br />
parler, un jour, d’un homme qui ne voyait pas comment se<br />
venger <strong>de</strong> son ennemi à moins <strong>de</strong> le tuer, alors qu’il ne visait<br />
rien <strong>de</strong> si définitif. Il défia donc l’homme en combat singulier, le<br />
vainquit, et pendant que son adversaire était étendu à terre,<br />
inconscient suite à la perte <strong>de</strong> sang, il lui coupa le bras et le<br />
recousit à l’envers. Il aima tellement le résultat qu’il fit <strong>de</strong> même<br />
pour l’autre bras, puis les jambes aussi, au niveau <strong>de</strong>s hanches,<br />
<strong>de</strong> sorte que les fesses du bonhomme se retrouvaient du même<br />
côté que sa figure. Et, bien sûr, il avait une queue. C’était la<br />
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