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Note de l'autour

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que dans le mon<strong>de</strong> hors <strong>de</strong> Schwartz, la mort faisait partie du<br />

tableau. Même tuer, tant qu’on n’y recourait que par besoin,<br />

faisait partie <strong>de</strong> la nature. J’avais mangé <strong>de</strong>s plantes et <strong>de</strong>s<br />

animaux morts toute ma vie, pourtant le sable m’avait accepté<br />

quand j’avais sauté <strong>de</strong> l’éminence rocheuse. Alors, quoi qu’en<br />

aient dit les Schwartz, je savais que l’agriculture ne relevait pas<br />

du meurtre, et je travaillai dur et bien pour Glain et Vran.<br />

Avec le temps, les autres familles <strong>de</strong> bergers vinrent leur<br />

rendre visite et finirent par surmonter leur timidité en ma<br />

présence. Je savais que l’histoire <strong>de</strong> mes nuits passées sur la<br />

colline et mon habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> dormir sur le coin <strong>de</strong> sol le plus froid<br />

étaient connues <strong>de</strong> tous et, si l’on m’appelait Buveur-<strong>de</strong>-lac en<br />

face à face, j’entendis dans mon dos <strong>de</strong>s références à l’homme<br />

du vent, un être légendaire qui vient pour tuer ou guérir, amené<br />

par le vent froid et finalement repris par la mer.<br />

Toutefois, n’ayant pas l’habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s gens <strong>de</strong> prestige ou <strong>de</strong><br />

pouvoir parmi eux, ils ne savaient pas comment me faire<br />

honneur, si ce n’est en me traitant comme eux-mêmes. Là où<br />

tous les hommes sont uniformément pauvres, la seule<br />

récompense est la confiance, et je reçus la leur. J’appris à mener<br />

les bêtes, à tondre la laine avec <strong>de</strong>s lames <strong>de</strong> verre sans entailler<br />

la peau, à ai<strong>de</strong>r les brebis à mettre bas, à reconnaître quand les<br />

moutons étaient nerveux et quand ils étaient mala<strong>de</strong>s. J’appris<br />

aussi la terre – pas <strong>de</strong> la façon personnelle que j’avais connue à<br />

Schwartz et Ku Kuei, mais comme une alliée réticente dans la<br />

lutte contre la famine. Bien que je n’aie jamais ressenti la faim<br />

moi-même, je connaissais le visage <strong>de</strong>s enfants quand ils<br />

avaient faim, et je trimais d’autant plus dur.<br />

Le travail commença avec une semaine d’avance pour Vran.<br />

Cela se produisit alors que j’étais seul avec elle et les enfants. Il<br />

<strong>de</strong>vint bientôt clair que le bébé ne viendrait pas facilement. Elle<br />

hurlait dans la maison tandis que les enfants étaient <strong>de</strong>hors<br />

avec moi. Les mères <strong>de</strong> Bosselé mettaient leurs bébés au mon<strong>de</strong><br />

sans assistance, seules. Il était interdit aux hommes d’entrer<br />

dans la maison pendant l’accouchement. Mais alors que les<br />

enfants restaient près du potager, effrayés, je m’étendis sur le<br />

sol et écoutai les hurlements <strong>de</strong> Vran tels que la terre les<br />

entendait, et je sus que sa mort était proche.<br />

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