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Note de l'autour

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celui <strong>de</strong>s parents, et ils se préparaient en effet à dormir sur le sol<br />

<strong>de</strong> terre battue. J’avais dormi à même le sol pendant plus d’une<br />

manœuvre <strong>de</strong> terrain à Mueller, bien avant que la terre ne<br />

m’apprenne une autre forme d’accueil à Schwartz. J’ignorai<br />

donc le lit qu’on m’offrait et m’installai par terre, près <strong>de</strong> la<br />

porte. Il y avait là un courant d’air froid, mais mon corps formé<br />

à Schwartz s’en accommodait sans peine, et les parents,<br />

étonnés, se couchèrent dans la paille.<br />

Au matin, je faisais partie <strong>de</strong> la famille, et les enfants<br />

discutaient librement en ma présence.<br />

« Glain », dit le berger, puis, en lançant un regard à sa<br />

femme : « Vran. »<br />

À partir <strong>de</strong> là, nous n’eûmes jamais <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> conversation,<br />

mais nous pouvions dire ce que nous avions à dire.<br />

Ses chiens étaient morts dans la même semaine, un mois plus<br />

tôt, et il avait <strong>de</strong>puis perdu une bonne dizaine <strong>de</strong> moutons qui<br />

s’étaient éloignés sans qu’il puisse aller les rechercher. Je<br />

commençai par gar<strong>de</strong>r le troupeau avec lui pendant qu’il<br />

formait un chiot né chez un voisin. Plus tard, je restai à la<br />

maison pour m’occuper <strong>de</strong> son potager pendant que sa femme<br />

était alitée à cause d’une quatrième grossesse.<br />

Je fus d’abord gêné <strong>de</strong> retirer tant <strong>de</strong> pierres vivantes du sol<br />

et <strong>de</strong> les entasser en piles mortes. Je m’étais si longtemps<br />

abstenu <strong>de</strong> tuer qu’il me pesait même <strong>de</strong> savoir que les plantes<br />

dont je m’occupais ne pousseraient que pour être tuées. La nuit,<br />

je posais la question à la terre, pour ne récolter qu’indifférence.<br />

La mort d’un milliard <strong>de</strong> plantes engendrait une plainte intense,<br />

mais c’était une mort nécessaire à la vie. Pour la première fois,<br />

je compris que, malgré leur génie, l’obsession <strong>de</strong>s Schwartz à<br />

refuser <strong>de</strong> tuer était aussi contre-productive à long terme que la<br />

façon égoïste dont les Ku Kuei se servaient <strong>de</strong> leur pouvoir sur le<br />

temps.<br />

Les Schwartz se maintenaient plus purs encore que la terre ne<br />

l’exigeait et, ce faisant, ils empêchaient tous les autres êtres<br />

humains d’approcher la pureté.<br />

Ce qui faisait souffrir le roc, c’étaient les cris issus <strong>de</strong> morts<br />

inutiles ou cruelles, les hurlements <strong>de</strong> ceux qu’on assassinait.<br />

J’entendais tous ces bruits et toute la douleur, mais je décidai<br />

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