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Note de l'autour

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— Tu es le seul à m’appeler ainsi.<br />

— Je suis le seul à t’appeler tout court, répondit-il. Et<br />

comment va Souche ? »<br />

Quand je découvris qu’il parlait <strong>de</strong> Saranna, je le laissai en<br />

plan. Il ne comprenait pas la raison <strong>de</strong> ma colère. Il trouvait ce<br />

nom approprié.<br />

Je suppose que les mois que je passai à Ku Kuei furent une<br />

pério<strong>de</strong> idyllique, comme mon séjour à Schwartz. Mais là-bas<br />

j’étais encore enthousiaste pour l’avenir. À Ku Kuei, mon avenir<br />

était <strong>de</strong>rrière moi. Et Père cherchait à mourir.<br />

Je m’en rendis compte au <strong>de</strong>uxième jour <strong>de</strong> nos leçons avec<br />

Celui-qui-sait-tout. Saranna et moi étions étendus dans l’herbe,<br />

les yeux fermés, très attentifs alors que notre professeur parlait<br />

bas, chantait à l’occasion et tentait <strong>de</strong> nous ai<strong>de</strong>r à percevoir son<br />

propre flux temporel qui nous enveloppait. J’ignore ce qui me<br />

tira <strong>de</strong> la transe (j’en sortis involontairement, j’en suis sûr, car<br />

Celui-qui-sait-tout a le flux temporel le plus doux que j’aie<br />

jamais partagé), mais je me tournai du côté <strong>de</strong> Père : il avait les<br />

yeux ouverts, plantés dans le ciel, et une larme coulait <strong>de</strong> son<br />

œil vers ses cheveux.<br />

Sur le coup, je chassai l’inquiétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> mon esprit. Père avait<br />

sûrement beaucoup <strong>de</strong> raisons <strong>de</strong> se sentir coupable. Inutile<br />

d’essayer <strong>de</strong> le forcer à afficher une joie qu’il ne ressentait pas.<br />

Mais à cause <strong>de</strong> lui j’eus bientôt <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> mal à<br />

partager l’humeur insouciante qui étreignait sans relâche les Ku<br />

Kuei. Étreints sans relâche, les Ku Kuei ? Non, c’était mon<br />

attitu<strong>de</strong> à moi. Même si parfois je me sentais détendu, aimé, si<br />

je me sentais bien, je n’étais jamais tout à fait en paix.<br />

Essentiellement à cause <strong>de</strong> mon inquiétu<strong>de</strong> pour Père. Mais en<br />

partie aussi parce que, <strong>de</strong> toute mon enfance, on ne m’avait<br />

jamais appris à lâcher prise, à ne pas me sentir concerné. Je<br />

sortais juste d’une année très difficile, et ses effets tardaient à<br />

s’estomper. Et puis il est impossible <strong>de</strong> ne pas se sentir concerné<br />

quand on a entendu la musique <strong>de</strong> la terre.<br />

« Tu es trop passionné, dit Celui-qui-tomba-sur-les-fesses<br />

(nom que j’avais finalement donné au chef que j’avais plusieurs<br />

fois renversé – il adorait ce nom et plusieurs <strong>de</strong> ses amis<br />

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