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Note de l'autour

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étaient prêts à faire, d’autant qu’il n’y avait rien d’amusant dans<br />

la mort. Je lui tins la main tandis qu’il respirait avec difficulté.<br />

Il avait maigri, même s’il <strong>de</strong>meurait gras. Sa peau pendait,<br />

détendue.<br />

« Je peux te guérir, lui dis-je.<br />

— Ne te donne pas cette peine.<br />

— J’en suis sûr. Je peux te remettre à neuf. J’ai appris à<br />

Schwartz. Ils vivent éternellement, là-bas.<br />

— Et pour quoi faire ? <strong>de</strong>manda-t-il. Je ne me suis pas<br />

dépêché tout ce temps pour me faire flouer maintenant. » Il<br />

gloussa.<br />

« Qu’est-ce qui te fait rire ?<br />

— La vie, dit-il. Et toi. Ah, Ventre-serré. Mon cher Buveur-<strong>de</strong>lac.<br />

Assèche-moi. »<br />

Il m’apparut que je <strong>de</strong>vais être le seul <strong>de</strong> tout Ku Kuei qui<br />

porterait son <strong>de</strong>uil. On ignorait la mort, ici. C’avait été le cas<br />

quand mon père avait disparu. Celui-qui-tomba-sur-les-fesses<br />

avait eu beaucoup d’amis. Où étaient-ils ? Ils se cherchaient <strong>de</strong><br />

nouveaux amis qui n’avaient pas vécu à toute vitesse et usé leur<br />

temps avant les autres.<br />

« La vie n’avait pas <strong>de</strong> sens à mes yeux, dit-il. Mais elle en a<br />

un pour toi. Nous nous prétendons heureux parce que nous<br />

avons l’espoir, mais c’est un mensonge. Nous n’avons pas<br />

d’espoir. Tu es le seul homme <strong>de</strong> ma connaissance qui ait espéré<br />

quelque chose, Buveur-<strong>de</strong>-lac. Alors va-t’en. Ici, c’est un<br />

cimetière. Va-t’en sauver le mon<strong>de</strong>. Tu en es capable, tu sais. Et<br />

sinon, personne ne l’est. »<br />

Je remarquai avec étonnement qu’il ne riait pas.<br />

« Tu es sérieux, hein ?<br />

— Je t’aime bien, Buveur-<strong>de</strong>-lac », répondit-il ; puis il<br />

mourut. Son flux temporel se poursuivit suffisamment pour<br />

qu’en quelques minutes <strong>de</strong> temps réel il se décompose<br />

largement, et nul ne déplaça donc son corps. Son cadavre<br />

s’effrita simplement et se fondit avec la terre.<br />

Je m’enfonçai moi aussi dans le sol, le laissant se refermer<br />

au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> moi pour écouter encore la musique <strong>de</strong> la terre. La<br />

guerre était terminée ; les cris <strong>de</strong>s morts étaient isolés<br />

désormais – constants, mais isolés dans l’espace, les décès se<br />

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