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Bernard Taverne, Alice Desclaux, Papa Salif Sow

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CHAPITRE III-1De l’expérience des PvVIH à des carrières de malades chroniquesird-00718213, version 1 - 16 Jul 2012que l’encadrement n’a pas été suffisant pour leurpermettre de jouer le rôle d’informateurs auprès d’autresmembres associatifs et celui de contrepoids vis-à-visd’autres acteurs. Il faut noter que les personnes rencontréesont pour la plupart un niveau scolaire assez bas.Les associations dépendent ainsi des chercheurs, desprofessionnels (médecins, assistants sociaux, pharmaciens,etc.) pour répondre à des appels d’offres en vued’obtenir des financements pour leurs actions. Le transfertdes compétences reste difficile dans un tel contexte.Avec le temps, le nombre des bénéficiaires des associationsaugmente alors même que la compétition pourl’accès aux financements devient plus rude. Les individusdépendent des services de soins pour l’accès à desappuis socio-économiques, désormais limités.Si la longue pratique des services de santé a permisà certains – inscrits notamment dans les associations– d’améliorer leurs connaissances sur la maladie, lesmédicaments, les effets secondaires, etc., les PvVIHsont nombreuses à ne pas pouvoir se prévaloir detelles connaissances. Même parmi les responsablesassociatifs, les questions liées par exemple à lalipodystrophie ou aux effets secondaires de certainesmolécules, ne sont pas connues avec précision. Dece point de vue, les questions sont nombreusesauxquelles les associations ne peuvent fournir deréponse à l’image de la question abordée antérieurementconcernant la contre-indication de l’Efavirenzen cas de désir de grossesse. Les arbitrages personnelset les échanges de représentations profanesprennent alors le pas sur les prises de décisionséclairées.Les associations auxquelles nous nous sommesintéressé proposent des groupes d’« auto-support » (4) ,dans lesquels les personnes s’entraident « entrepairs » ou par l’intervention de « médiateurs ». Nombreusessont les PvVIH qui n’ont pas adhéré auxassociations. Les responsables associatifs estimentque les hommes fréquentent moins les associationsque les femmes pour diverses raisons : peur d’y êtrevus et reconnus, crainte d’être stigmatisés, manquede temps réel ou supposé. Cette faible fréquentationdes associations peut aussi s’expliquer par la faiblevisibilité d’associations qui évoluent dans l’ombre dessystèmes de prises en charge et des professionnelsde santé et de recherche qui confère à certaines(4) « (…) des structures créées par des personnes confrontées à un problèmecommun et décidées à y faire face en s’appuyant sur leur organisation collectiveet leurs moyens » (Adam & Herzlich, 2007 : 116).(5) Ceci n’est pas spécifique au Sénégal, cf. l’intéressante analyse des profilsd’associations en France que fait P. Mangeot sur la pagehttp://www.vacarme.org/article456.html (consulté le 05 juin 2011).associations une faible visibilité sociale. De plus, peude responsables associatifs apparaissent publiquementdans des grands rassemblements sociaux enmettant en avant leur statut de PvVIH (5) . De la sorte,les revendications autour de différentes questions(allaitement artificiel, accès aux molécules les plusrécentes, lipodystrophies, etc.) sont peu portées parles associations. Si le temps a joué dans une affirmationprogressive de PvVIH dans des groupesrestreints, cette affirmation ne s’opère pas dans descercles plus élargis où les PvVIH courent plus derisques d’être identifiées comme porteuses du VIH,comme l’indique le propos qui suit :« Grâce aux associations, j’ai pu me former et communiqueren public. J’ai pu communiquer, extérioriserce que je pense. J’ai fait beaucoup de témoignagesdans des entreprises. J’évite juste des milieux oùj’ai des connaissances. Je n’en suis pas encore auniveau de I. G. Je reste longtemps avant de parlerpour mieux regarder l’assistance pour voir s’il y a desgens qui me connaissent. Il m’est arrivé une fois dedire aux gens que je n’allais pas communiquerpuisqu’il y avait quelqu’un dans la salle que jeconnaissais » (Babacar, 52 ans).3. L’EXPERIENCE SUBJECTIVE3.1. Les signes distinctifs et le stigmateS’il était fréquent et justifié de se poser la question dela stigmatisation des PvVIH au début de l’épidémie,lorsque les signes physiques étaient visibles et lesmarqueurs corporels flagrants, on peut se demandersi la stigmatisation est encore d’actualité – alors quel’accès aux médicaments a amélioré l’état de santédes PvVIH et les a inscrites dans une maladie devenuechronique au lieu d’être d’emblée mortelle.Rappelons que la réflexion sur la stigmatisation dansle domaine socio-anthropologique est fortement liéeà Erving Goffman (1963, 1975), dont l’ouvrage –Stigmates - constitue une introduction à l’analyseinteractionniste. Le stigmate désigne ici toute caractéristiquephysique, psychologique ou culturelle de lapersonne (ou de l’individu) pouvant contribuer à ladiscréditer ou à la reléguer aux yeux des autres,lorsque celle-ci est connue ou découverte (Goffman1963). La stigmatisation peut, de ce fait, être considéréeà la fois comme un processus de discrédit et lerésultat auquel celui-ci aboutit. Pour ce qui est spécifiquementde la stigmatisation liée au VIH, elle peutêtre définie comme :108

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