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Bernard Taverne, Alice Desclaux, Papa Salif Sow

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CHAPITRE V-1Perceptions et prise en charge des échecs thérapeutiquesird-00718213, version 1 - 16 Jul 2012sa belle-famille c’est un problème aussi ». L’absencede soutien familial est mis en relation avec la craintede la stigmatisation, le refus d’informer les proches surla nature de la maladie. La crainte d’une rupture deconfidentialité oblige les patients à diverses stratégiespour maintenir le secret autour de leur maladie quipeuvent les amener à ne pas prendre leur traitementde manière régulière ou même à ne pas se rendre àcertaines consultations médicales. Enfin, la « fatigue »,la « tristesse », « le poids de la maladie sur la tête »,expressions qui traduisent divers symptômes dépressifs,sont cités comme causes de moindre intérêt autraitement et parfois « d’oublis des médicaments ».Les membres des associations affirment que lesoutien associatif est une protection contre l’échecdes traitements : « Faire partie de l’association permetd’échanger, de partager, les personnes qui ne sontpas dans les associations ont plus de problèmes quecelles qui sont y sont. »– Les difficultés économiquesSe déplacer, payer les soins, se nourrir, constituent pourde nombreux patients des obstacles permanents à larégularité de leur suivi médical. La plupart des patientsrencontrés n’ont pas de travail. Plusieurs patients associentleur abandon des traitements au cours des premièresannée de leur prise en charge à leur incapacité àacheter les médicaments : « Très vite, j’ai eu des problèmespour payer les ordonnances, je ne pouvais plus, jene pouvais même plus payer le transport, alors j’aiarrêté, je me disais que j’allais attendre Dieu ». Bien queles médicaments ARV soient distribués gratuitementdepuis décembre 2003, la pauvreté économique continueà interférer avec les soins : « Des fois, je suismalade, mais je ne viens pas à l’hôpital car je n’ai pasd’argent pour payer le transport, et puis si je viens et queje n’ai pas d’argent pour payer la consultation, ils ne vontpas me prendre ». Un autre patient témoigne : « Moi,je gagne 50 000 FCFA/mois [76 €], le bilan est à 8000FCFA [12,20 €], où est-ce que je vais trouver cetargent ? Alors je reste à la maison ». Pour certainspatients, les difficultés concernent aussi leur alimentation: « Quand tu as faim, tu ne peux pas prendre lesmédicaments ; tu ne peux pas prendre les médicamentssi tu n’as rien à manger, si tu les prends sans manger, çafait mal dans le ventre, alors quand je n’ai rien à manger,je ne les prends pas, je laisse les médicaments, aprèsça fait une résistance ». Un autre affirme : « Quand onn’a pas de travail, pas de soutien, c’est très difficile, mois’il y a des problèmes pour se nourrir, je préfère que lafamille passe avant ». Un membre associatif confirme :« Il y a des personnes qui n’ont même pas à manger lematin pour prendre leur ARV, et parfois même pour lerepas de midi, elles n’ont pas ».– L’organisation des soinsLes patients désignent divers dysfonctionnementsde l’organisation des soins dont ils considèrentqu’ils ont un impact direct sur la qualité du suivimédical : les absences répétées et non planifiéesdes médecins qui assurent les consultations (« Onarrive, le médecin est parti, on te dit de revenir »,« On est là, on attend toute la matinée, puis à la finon te dit qu’il ne viendra pas ! »), les contrainteshoraires imposées au patients (« Si tu arrives unpeu tard, on te dit que l’on ne peut pas te prendre,on te consulte pas, qu’il faudra revenir », « Si tuarrives après 10h, on te dit que l’on ne peut plusfaire les bilans, qu’il faut revenir demain »). Despatients affirment avoir ainsi manqué plusieursconsultations médicales et examens biologiquesde suivi à cause de leur impossibilité à se libérerplusieurs jours de suite.Un patient évoque la négligence du personnel médicallors d’une hospitalisation à la suite d’un accidentvasculaire cérébral, pendant toute la durée delaquelle son traitement ARV a été interrompu : « J’aiprévenu le docteur que j’étais séropositif, quej’avais un traitement, mais il n’a rien fait, on m’adonné le traitement du diabète, de l’AVC, mais pasles ARV, c’est à la suite de ça que j’ai rechuté ».Plusieurs soulignent également le manque de communicationavec les médecins « qui ne prennentpas assez le temps d’expliquer pourquoi il fautchanger de traitement ». « Les médecins manquentde temps et de disponibilités pour écouter, parfoismême, ils ne t’examinent pas », « Je connais unefemme, elle a arrêté de venir car elle ne s’entendpas avec son médecin, elle ne veut plus être suiviepar lui » rapporte un patient. Quelques patientsregrettent aussi le manque d’information sur ledispositif social d’accompagnement des soins (rôleset prestations des associations, du service social).– La perte de l’autonomie dans la gestion du traitementLa perte de l’autonomie dans la gestion du traitementest considérée comme étant à l’origine del’échec de son traitement par un patient qui a étévictime d’un accident vasculaire cérébral et engarde des séquelles motrices. Il nécessite désormaisune aide pour la prise de son traitement et setrouve donc dépendant de ses proches : « Mesfemmes sont analphabètes, elles me donnent lesmédicaments mais à n’importe quelle heure, alorsqu’il faut respecter les heures, c’est ce qui m’atroublé ».303

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