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Bernard Taverne, Alice Desclaux, Papa Salif Sow

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CHAPITRE IV-4Les attitudes en matière de procréationird-00718213, version 1 - 16 Jul 2012au VIH. En effet, les femmes enquêtées rapportentque dès l’annonce de leur séropositivité les professionnelsde santé ont eu des propos visant à découragervoire interdire toute nouvelle procréation.Dans certains cas où elles-mêmes ont déjà été trèsaffectées par des épisodes récurrents de maladie,avec un amaigrissement important, leur entourage aeu des soupçons sur leur statut VIH. Certainesd’entre elles ont été quelquefois victimes d’actes dediscrimination par leur famille. Lorsqu’elles retrouventla santé et reprennent du poids, avoir un ouplusieurs enfant permet d’infirmer définitivement lessoupçons, voire de culpabiliser ceux qui y croyaient.C’est le cas de Fatma, 34 ans, mère de 7 enfantsdont un séropositif. Elle est traitée par ARV depuis 6ans et a eu trois maternités depuis que sa séropositivitélui a été annoncée. Elle vivait dans un villageoù sa séropositivité a été diagnostiquée par unagent de santé de la structure sanitaire qui en ainformé sa famille contre son gré. Après diversconflits et actes de discrimination elle a préférévenir à Dakar pour rejoindre son époux où elle a pubénéficier d’un traitement antirétroviral qui lui apermis de retrouver la santé. Ses grossessessuccessives menées sans difficultés apparentes ontamené les membres de sa famille à lui demanderpardon pour les propos et les actes discriminatoiresqu’ils avaient tenus vis-à-vis d’elle. Elle raconte sonexpérience :« Lorsqu’on a des enfants les soupçons diminuent.Les gens de mon village disent qu’avec la maladie situ as un enfant tu vas mourir. La maladie ne pasdurer plus d’une année sans te tuer. Quand monpère a entendu que j’ai eu plusieurs enfants il m’aappelée pour me dire que les gens qui disaient quetu as le sida ont menti puisque on ne peut pas avoircette maladie et avoir un enfant ».Plusieurs femmes enquêtées qui avaient déjà eudes enfants au moment de l’annonce de leur séropositivitéont rapporté qu’ayant remarqué qu’ellesse sentaient beaucoup mieux avec les antirétroviraux,elles ont souhaité tester leur capacité à redevenirmères. Elles ont perçu la possibilité d’avoir unautre enfant malgré le handicap du VIH comme lamanifestation d’une « double bravoure » en phaseavec les valeurs féminines.Pour certaines femmes, déjà mères d’enfants séropositifsvivants ou décédés, avoir un nouvel enfant« sain » a permis de réduire la culpabilité liée à latransmission du VIH lors d’une maternité précédenteAvoir un enfant pour atténuer les conflitset consolider les liens conjugauxAvoir un enfant lorsqu’on est confrontée à des conflitslatents ou ouverts au sein du couple, de la belle-familleou de son entourage immédiat en raison du VIH, peutcontribuer à réduire les tensions. Diverses expériencesrapportées par les femmes enquêtées ont montrécomment la survenue d’une grossesse a pacifié unerelation conjugale difficile ou fortement dégradée enraison des conflits liés à l’infection à VIH. C’est le casdans des couples où les deux conjoints sont séropositifset dont les épouses se considèrent victimes del’inconduite sexuelle de leurs maris. Des femmesenquêtées rapportent comment la survenue d’unegrossesse les contraint à taire leurs récriminations, ànégocier des compromis voire à se soumettre davantageaux désirs de leurs conjoints pour que leur enfantpuisse bénéficier des meilleures conditions de vie.« Mes relations avec mon mari n’étaient pas bonnes àcause de la maladie. Je pense que c’est lui qui m’acontaminé avec le VIH. Mais quand j’ai eu un enfantma colère a beaucoup diminué envers lui. Quand tu asun enfant avec un homme et tu lui fais du mal ça va serépercuter sur ton enfant. Moi j’aime mon enfant je neveux pas qu’il ait des problèmes dans sa vie, 2008,Amy, 35 ans mère d’un enfant de 8 ans.Certaines femmes dont la séropositivité a été dépistéelors de leur première grossesse avec un nouveauconjoint ont décidé d’avoir un autre enfant avec luipour réduire les risques de séparation, de divorce oude divulgation de leur statut VIH. Elles ont généralementeu d’autres partenaires sexuels que leur conjointactuel ; la plupart se sont remariées après un divorceou un veuvage. Elles essaient de renforcer « les liensdu sang » pour réduire les éventuels conflits. C’est lecas d’Astou : remariée après un divorce, elle a étéinformée de son statut sérologique ; elle décide d’enparler à son époux après la naissance de l’enfant maisfinit par perdre la grossesse. Elle décide d’avoir unautre enfant le plus rapidement possible. Ne supportantplus d’être régulièrement contactée par le médecinou l’assistante sociale qui ont réalisé le dépistageVIH, elle coupe tout lien avec la structure de santé oùsa séropositivité lui a été annoncée. Elle finit par êtrede nouveau enceinte et se fait suivre dans une structureprivée sans les informer de son statut VIH. Elle estalors recontactée par l’assistante sociale qui laconvainc de revenir pour être mise traitée par ARV.Elle est suivie jusqu’à son accouchement qui sedéroule sans problème. Elle pratique l’allaitementartificiel. Au bout d’une année, la confirmation de laséronégativité de l’enfant lui est annoncée. Elle décide235

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