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Bernard Taverne, Alice Desclaux, Papa Salif Sow

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CHAPITRE V-6Mesurer la stigmatisation : comparaison entre approches relativiste et universaliste auprès des veuvesird-00718213, version 1 - 16 Jul 2012tées évoquant par exemple la divulgation liée à lafréquentation d’une association de personnes vivantavec le VIH. Il fallait alors engager un dialogue entreenquêteur et personne interviewée, impliquant desarbitrages pour distinguer les divulgations nécessairesd’autres discriminatoires. Aussi, l’absence de distinctionnette et a priori entre espace social respectant laconfidentialité et espace social soumis à des abus arendu particulièrement difficile l’utilisation de ce critère,probablement plus pertinent dans d’autres contextessociaux et culturels.Par ailleurs, de manière générale, les items proposésdans les outils de l’Enquête Questionnaires pourappréhender la stigmatisation sont aptes essentiellementà saisir des situations intenses et explicites, sanspouvoir recueilir des attitudes implicites plus fréquentesdans le contexte sénégalais.5.3. Des formes d’expression de la stigmatisationliée au VIH propres à une situationsocialeLes histoires de cas qui ont été rapportées par lesveuves montrent qu’elles vivent des situations difficilesqu’elles ne vivraient pas de la même manière si leurconjoint n’était pas décédé d’une infection à VIH. Lamajorité des récits rapportent les aspects suivants : lefait d’être identifiée comme atteinte par le VIH ;l’incapacité à annoncer son statut VIH à ses prochespour réduire la pression qu’ils exercent en faveur d’unremariage ; l’incapacité à annoncer son statut à unprétendant par crainte que celui-ci ne le divulgue à destiers ; et la perception d’être contagieuse.Ces situations créent une distinction ou unedifférence, dévalorisante ou péjorative, vis-à-vis desautres femmes veuves, au statut déjà défavorabledans la société sénégalaise : elles corespondent à ladéfinition commune de la stigmatisation.La suspicion par des tiers d’être infectée et sesconséquencesPlusieurs veuves ont rapporté avoir été « étiquetées »comme infectées par le VIH du fait des circonstancesdu décès de leur mari, notamment après son retour del’étranger (en particulier de Côte-d’Ivoire). Le fait defaire l’objet d’un diagnostic « profane », sur la based’une « épidémiologie populaire », n’expose pasforcément à une stigmatisation « en actes ». Mais cesveuves rapportent des réactions d’évitement, notammentde la part de la belle-famille, qui ne sont passystématiquement malveillantes mais pourraient êtreparfois induites par une perception très péjorative deleur avenir. Dans d’autres cas des femmes décriventdes attitudes de rejet caractérisé et « classique » entreco-épouses ou dans des relations « à enjeux » dansune famille : la suspicion d’infection à VIH justifiel’accaparement, la spoliation, le rejet. La conséquencela plus fréquente pour les veuves semble être enpremier lieu une amplification de l’abandon par lesbelles-familles de toute responsabilité concernant lasurvie économique de la veuve et de ses enfants.Les difficultés particulières à se protéger contreles pressions au remariage et leurs conséquencesUne proportion importante des veuves décrivent lespressions au remariage qu’elles subissent de la partde tiers, dont elles ne peuvent se protéger car il leurfaudrait pour cela dévoiler leur statut sérologique. Undévoilement du statut VIH non consenti est uneatteinte au respect de la personne. L’agression dont ilest fait état ici n’est pas forcément perçue comme tellede la part des tiers qui le plus souvent ne savent pasque le VIH est en jeu et ne le mentionnent pas. D’autrepart elle n’est pas spécifique du VIH et concerneraittoute femme veuve qui refuse des prétendants. C’estla situation d’impasse, le « secret indicible », qui estpropre à l’implication du VIH dans ce cas. La souffrancepsychique et sociale qu’elle provoque peut êtreconsidérée comme une conséquence spécifique de lastigmatisation liée au VIH, concernant les veuves.L’incapacité à communiquer sur le statut VIH avecun prétendant et ses conséquencesLes femmes qui souhaitent se remarier ont rapportéleurs tentatives de trouver un conjoint, et décrit les situationscomplexes qu’elles ont dû affronter. Dans de nombreuxcas, elles ont rencontré des « prétendants ». Laquasi totalité d’entre elles souhaitaient leur communiquerleur statut VIH, afin de ne se lancer dans uneunion matrimoniale qu’en toute connaissance réciproquedu statut VIH, pour éviter de revivre l’expériencede leur première union. Mais dans la plupart des cas,la crainte que la personne ne la rejette ou ne divulgueson statut VIH à des tiers les a empéchées de sedéclarer. Dans ce contexte, comme dans la situationdécrite au-dessus, la stigmatisation (ou l'auto-stigmatisation)n’est pas explicite. Les femmes veuves viventplutôt une « perte de chance », qu’elles subissent etqui les maintient dans la « condition des veuves » dontle chapitre précédent a montré le sens très péjoratif.Dans ce cas également, elles sont exposées à uneconséquence sociale particulière de la stigmatisationglobale, difffuse dans la population, qui les conduit à390

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