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Bernard Taverne, Alice Desclaux, Papa Salif Sow

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CHAPITRE IV-3Le partage de l’information sur son statut sérologique dans un contexte de polygamieird-00718213, version 1 - 16 Jul 2012chez certains patients qui n’étaient plus confrontés àdes problèmes de santé graves, le cercle des prochesinformés de leur statut sérologique s’est élargi.Certains patients qui ne partageaient l’informationqu’avec leur conjoint ont fini par informer un membrede leur famille de leur statut sérologique. D’autres ontfini par accepter de parler à leur conjoint. Ils justifient ceschangements par la persistance d’une bonne santé quileur permet d’attester de leur bonne « forme » auprèsde leurs proches en les informant de leur statut sérologique.Ils préparent progressivement leur entourage àl’annonce par des allusions, des sous-entendus oubien la mise en évidence plus ou moins volontaires deleurs médicaments ARV afin de tester la capacité decompréhension de l’entourage. Lorsqu’ils jugent lemoment propice, ils annoncent leur statut en insistantparticulièrement sur l’efficacité des ARV attestée parleur bonne santé qui leur permet de mener une viequasi normale. Les patients qui ont partagél’information avec leur entourage dans ces conditionsexpliquent qu’ils ont été soutenus par ces personneset qu’ils sont soulagés de ne plus avoir à mentir. C’estle cas de Hamed, 45 ans, divorcé, qui a mis plus de dixans avant d’en parler à sa sœur :« Chaque fois qu’on en parlait à la télé, je faisais descommentaires sur le sida, sur les ARV ou je sensibilisaisles membres de la famille, j’essayais de leur direde faire attention, que tout le monde peut attrapercette maladie, un jour elle m’a dit j’ai l’impression quetu en sais beaucoup, je lui ai dit oui parce que jeconnais des gens qui l’ont. Une autre fois, elle m’ademandé qui étaient ces gens, je l’ai regardée en faceet je lui ai dit : c’est moi ».3.7. Le partage dans les foyers polygamesDans le cadre d’un couple polygamique, le partage del’information concerne plusieurs partenaires sexuels,conjoints officiels, qui sont susceptibles d’entretenirrégulièrement de manière officielle des relationssexuelles non protégées, et donc exposés au risquede transmission sexuelle du VIH. Le dépistage VIHdes conjoints pourrait conduire à plusieurs configurations: tous les conjoints peuvent êtres séropositif auVIH, l’un ou plusieurs d’entre eux peuvent être séropositifsou séronégatifs. Ces situations de séroconcordanceou sérodifférence à plusieurs niveaux peuventavoir des implications variables, liées à la positiondans la configuration matrimoniale, au contexterelationnel et au statut socio-économique desconjoints. Parmi les femmes interrogées dans le cadrede la PTME, 12 sur 25 n’ont pas partagé l’informationavec le conjoint. 10 d’entre elles vivent dans desménages polygames, deux dans un mariage monogameaprès avoir divorcé et s’être remariées. Celles quiont partagé l’information évoluent en majorité dans unménage monogame 8 sur 12, et 4 dans un ménagepolygame. Parmi les premiers patients suivis depuisplus de 10 ans, le nombre de mariages polygamiques aaugmenté, passant de 4 à 7. Parmi eux, 3 patientshommes qui se sont remariés après plusieurs annéesde thérapie antirétrovirale avec une seconde épouse, nel’ont pas informée de leur statut sérologique ; deuxhommes se sont remariés avec un membre d’une associationde PVVIH avec partage mutuel d'informations.Dans le contexte de polygamie, les motivations dupartage de l’information sont similaires à celles décritesplus haut mais des craintes spécifiques sont identifiées.Les patients redoutent particulièrement lesrisques de démultiplication de l’information et de divulgationdu statut sérologique. Dans un contexte familialmarqué par les rivalités entre les coépouses, leursfamilles d’origine et la belle-famille, qui s’exercentpréférentiellement à propos de la sexualité et la reproduction,la diffusion de l’information sur le statut sérologiquedes patients peut les exposer davantage à uneexacerbation des conflits préexistants et au rejet parl’entourage que dans un couple monogamique.Différentes situations sont observées en fonction dusexe, de la position du conjoint dans la configurationmatrimoniale, de l’histoire du couple et des circonstancespossibles de transmission du VIH.3.8. Typologie des pratiques de partage3.8.1. Un partage de l’information circonscritau coupleLes attitudes en matière de partage de l’informationdes personnes en situation de polygamie auprèsdesquelles nous avons enquêté dépendent de leurposition : les premières épouses partagent plus facilementl’information avec leur époux et vice versa.L’information peut être gérée durant plusieurs annéesentre les deux conjoints, dont l’un ou l’autre, ou lesdeux, peuvent être traités sans que les autres épousesn’en soient informées. Cette situation a été vécuepar Amie, 28 ans, seconde épouse d’un homme cadred’entreprise, qui 4 ans après son mariage, découvrefortuitement les ARV de son époux dans ses effetspersonnels. Après une recherche de renseignements,elle comprend que son conjoint et sa première épousesont séropositifs et suivent un traitement ARV depuisplusieurs années dans le plus grand secret. Elle avertitson époux et menace de faire scandale. La premièreépouse intervient et la supplie de ne rien dire pour lesprotéger tous, et elle s’engage à la soutenir dans la224

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