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Bernard Taverne, Alice Desclaux, Papa Salif Sow

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CHAPITRE V-1Perceptions et prise en charge des échecs thérapeutiquesird-00718213, version 1 - 16 Jul 2012aux rumeurs sur la toxicité des ARV, et enfin, l'appartenanceà une association de PvVIH. De nombreuxprofessionnels de santé considèrent en effet que lesmilitants associatifs très engagés ont un risque élevéde non observance à cause de la diversité des informationsqu’ils reçoivent à partir des pays du Nord quiont parfois suggéré d’interrompre les traitements pourfaire des « vacances thérapeutiques ».Ces différentes causes de non observance sontconnues ; la particularité de la situation de ces patientsen échecs thérapeutiques récidivants ou sur de longuespériodes semble tenir à l’addition ou à l’enchaînementde plusieurs causes pour chacun d’eux. Un clinicienrésume cette observation en déclarant : « ces patients,ce sont les patients à problèmes ! ». La plupart de cespatients cumulent effectivement les difficultés d'observanceet paraissent le plus souvent passer de l’une àl’autre en épuisant pour chacune d’elle les ressourcesdu dispositif psycho-social d'accompagnement (appuifinancier, soutien psychologique, médiation familiale,…).Chaque nouvelle combinaison thérapeutiquen’apporte au mieux qu’un succès virologique transitoire.L’échec thérapeutique apparaît chez cespatients comme la sanction de l’incapacité du dispositifde prise en charge à résoudre les diverses difficultésauxquelles ils doivent faire face. Ces patientsconfrontent les professionnels de santé aux limites deleurs compétences et de leurs possibilités, ce quisuscite parfois une forme de désengagement :« Qu’est ce qu’on peut faire de plus ? On a tout fait ».– Les causes biologiques :La première cause biologique mise en avant est la «résistance du VIH aux ARV ». Cette résistance estdécrite comme étant liée aux traitements initiaux demono ou bi-thérapies utilisés par certains patientsavant la mise en place du programme national (qui aimmédiatement employé des trithérapies avec IP), oubien aux « sur-contaminations » en cas de rapportssexuels non protégés.– Les dysfonctionnements organisationnels :Divers dysfonctionnements organisationnels sontconsidérés comme la cause des échecs thérapeutiquesou comme ayant un impact direct sur la prise encharge. Le premier cité est le délai de retour des résultatsde laboratoire (CD4, CV et génotypage), jusqu’à sixmois à certaines périodes, parfois lié à des rupturesd’approvisionnement en réactifs. Viennent ensuite : lemanque de communication dans les équipes de soinsentre médecins, pharmaciens, assistants sociaux ; lasurcharge de travail qui limite le temps consacré àchaque patient ; le manque de formation des professionnelsde santé qui a pu conduire à des « erreurs »de prescription ou de surveillance ; et enfin le manquede molécule de deuxième ligne.– L’épuisement professionnel :Les professionnels interrogés sont impliqués dans laprise en charge des PvVIH depuis de nombreusesannées, parfois depuis le début de l’ISAARV en 1998.Certains se disent fatigués, voire « épuisés par lacharge psychologique que leur infligent les patients ».Un médecin témoigne de l’étendue des demandes quilui sont adressées : « S’il n’y avait que le côté médical,ça irait, mais quand tu as réglé le problème médical, ily a le problème de famille, puis celui du travail, puis del’argent, puis du mariage… Parfois je fais la politiquede l’autruche avant que tout me tombe dessus ».3.2.1. Chez les patients3.2.1.1. « Le traitement ne marche pas »Parmi tous les patients interrogés sur l’histoire de leurprise en charge médicale et leurs différents changementsde traitement, un seul évoque spontanément lanotion « d’échec » du traitement. Ce patient estmembre depuis plusieurs années dans une associationde PvVIH et c’est dans le cadre de son activitéassociative qu’il s’est familiarisé avec cette notion : « Unjour j’ai suivi une formation, là, j’ai entendu que si onlaisse le traitement, si on s’arrête de le prendre, onpeut devenir résistant, le fait d’être résistant, c’est unéchec, une personne qui ne prend pas ses médicaments,si on lui dit “tu es résistant”, et bien c’est unéchec ». Lui seul également évoque le dosage desCD4 et de la charge virale comme éléments dudiagnostic : « On m’a fait le test, pour voir le bilan, pourvoir les CD4 et la charge virale, et on m’a dit “maintenanttu es résistant” ».Trois patients seulement ont mentionné les liens entreles examens biologiques, indistinctement nommés « lebilan », et l’annonce de la nécessité du changement detraitement : « J’ai arrêté le médicament, ça s’est répercutésur mon bilan, et le médecin a changé mon traitement» affirme l’un d’eux ; un autre précise : « Le dernierbilan, on m’a dit que c’est pas bon » mais ne sait donnerplus de précision.L’expression « échec thérapeutique » semble absentedu vocabulaire habituel de ces patients, peut-être àcause de la forte valeur symbolique du terme échecque les médecins eux-mêmes évitent d’employer. A lanotion d’échec est substituée celle de « résistance »301

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