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Bernard Taverne, Alice Desclaux, Papa Salif Sow

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CHAPITRE IV-6L’expérience du veuvage dans le contexte du VIHird-00718213, version 1 - 16 Jul 2012sociale considère qu’elle ne peuvent qu’être « envoie de remariage ».Deux itinéraires singuliersPour ouvrir cette section, les récits de deux femmesrassemblent plusieurs traits ou faits que d’autresfemmes ont également vécus, mais partiellement :Seynabou (42 ans) : Moi, après le décès de monmari, ma famille ne cesse de me demander pourquoije refuse de me remarier. J’ai eu beaucoup deprétendants du côté de ma famille et de ma belle-famille,mais j’ai refusé. J’ai eu beaucoup de problèmesà cause de cela. A la longue, tous ceux qui soutenaientfinancièrement mes enfants ont arrêté parcequ’ils croient que j’ai refusé de me remarier.Il y en a un parmi eux qui, à son retour des USA, estvenu demander ma main, mais puisque j’avaisrefusé, ma mère m’a demandé pourquoi je n’ai pasaccepté de me remarier. J’ai prétexté en lui disantque c’est à cause de mes enfants que je ne voulaispas me remarier. Elle m’a dit « et si tu trouvaisquelqu’un qui pourrait héberger tes enfants en mêmetemps ? » Je lui ai dit d’accord.Quelques temps après, un parent à moi est venudemander ma main, ma mère m’a dit que je devaisaccepter, mais je lui ai dit que je n’avais pas la tête àça. Ma famille m’en veut d’être restée seule duranttout ce temps. J’étais obligée de faire du micro jardinagepour subvenir à mes besoins. Ensuite, j’ai faitune formation pour devenir médiatrice.Maintenant, ça va mieux puisque les gens en parlentmoins. C’est pourquoi je n’y pense pas, mais sinon,j’avais beaucoup de problèmes à cause du mariage.Je me suis mariée à 18 ans et depuis que mon mariest décédé (8 ans auparavant) je ne me suis plusremariée. C’est pourquoi, chaque fois que je tombemalade, on me dit que c’est parce que je ne veux pasme remarier que je suis tout le temps malade.Je reconnais que parfois je me sens seule, c’estcomme si j’étais en manque de quelque chose etpsychologiquement ça me fatigue.Radia (46 ans) : Il y a des femmes qui ont peur de seremarier à cause de ce qu’elles ont enduré dans leurpremier mariage. D’autres par contre ne trouvent pasquelqu’un qu’il leur faut et dans notre cas, il estdifficile de se remarier à cause de notre statut. Il n’estpas aisé de rencontrer quelqu’un de même statut quesoi. Mon mari est parti d’ici depuis 2003, à cemoment nous ne nous étions pas séparés. En 2005on s’est séparés et quelques temps après, il estdécédé. Ma fille aînée a voulu que je me remarieavec le frère de mon défunt mari, mais je n’ai pasaccepté. Je lui ai dit qu’elle était témoin de ce quecette famille m’a fait subir. Lorsque mon défunt marim’a abandonnée pour aller au Mali, et la famille n’arien fait pour m’aider. J’ai un frère que me prenait encharge. Il m’avait logée chez lui et m’aidait aussi,mais, j’ai dû quitter chez lui parce qu’il voulait medonner en mariage et je ne voulais pas à cause demon statut. Il m’en veut parce qu’il dit que je suiscapricieuse et que je ne veux pas me remarier…Maintenant, aucun de mes frères, même ceux quisont aux USA ne veulent plus m’aider financièrementpuisque je ne veux pas me remarier.Je souhaiterais rencontrer quelqu’un de même statutque moi ici à l’hôpital, de ce fait, même s’il ne fait rienpour moi, ce n’est pas grave. L’essentiel est que lesgens ne me mettent plus de pression…A la première étape de leur itinéraire, ces personnesrapportent des propositions de lévirat, alors qu’ellesavaient respectivement 34 et 41 ans. Le refus de cettepremière proposition est suivi d’autres propositionsissues de la famille de ces femmes, ou de la belle-famille.Ce schéma est assez fréquent et fait appel à deuxformes de mariage dont la première –le lévirat- est unobjet classique d’étude ethnologique. Par ailleurs aucours des entretiens une autre forme d’union –le takkooestassez fréquemment mentionnée.La place du léviratUne forme de remariage avec un frère du défunt ouavec un de ses cousins a été proposée à 12 femmessur 17 auprès desquelles nous avons exploré cettequestion. Les situations semblent différer selon laconnaissance qu’avait la famille du statut sérologiquedu défunt. Dans la majorité des cas, la belle-famillepropose un conjoint –ce n’est pas le cas si la belle-famillevit à l’étranger et avait peu de contacts avec lecouple ; dans un cas où le mari défunt n’avait pas defrère, la belle-mère évoque un possible remariageavec un ami du défunt (un équivalent au lévirat ?).Une seule veuve a accepté la proposition (Salamata),mais son cas est particulier car elle pense qu’elle a étécontaminée par cet homme (le second mari), lepremier étant décédé d’une autre cause. Ce deuxièmehomme est parti à l’étranger 15 jours après le mariageet ne s’est plus occupée d’elle, ne l’a plus contactée,jusqu’à ce qu’elle apprenne son décès.268

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