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Bernard Taverne, Alice Desclaux, Papa Salif Sow

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CHAPITRE III-3Perception du risque de transmission et sexualitéird-00718213, version 1 - 16 Jul 2012Les patients disent qu’ils retrouvent le désir sexuel.Plus nombreux sont ceux qui rapportent qu’ils entretiennentà nouveau des relations sexuelles. Au fil desannées, la plupart des célibataires, des divorcé(e)sou des veufs(ves) sont soumis aux pressions socialesen vue de se marier et d’avoir des enfants mais ilscraignent d’informer un partenaire séronégatif de leurstatut sérologique..Dans les couples séroconcordants, l’usage dupréservatif se raréfie ; durant les premières périodesde la réviviscence du désir sexuel, les patient(e)srecherchent des partenaires sexuel(le)s au sein desassociations de PVVIH.La pression sociale et la peur de la stigmatisationpeuvent conduire les uns ou les autres à des expériencesde relations sexuelles accidentelles non protégéesou à des unions sans partage de l’information.Badou, sous ARV depuis neuf ans, raconte :« C’est un accident, on entretenait des relations protégées,puis un beau jour, en plein ébats, elle a retiré lacapote en me disant qu’elle me faisait confiance, alorson a eu des relations non protégées ».La perception de l’efficacité du traitement ARV ainversé celle de la gravité des risques : ceux qui sontliés à la rupture de confidentialité sur le statut sérologiquesont plus redoutés que ceux qui sont liés à latransmission du VIH.Cette période de reprise d’une vie sexuelle permetprogressivement un retour à des comportementssexuels plus conformes aux normes sociales.3.1.3. La période de retour à la « normale »Au bout de deux à trois ans de traitement ARV, laperception de la virulence du VIH et du risque de transmissionlors des relations sexuelles s’atténue encore.Certaines personnes enquêtées, notamment les jeunesfemmes, sont l’objet de pressions de l’entourage pour semarier et avoir des enfants. De nombreux hommesmariés perçoivent l’usage du préservatif comme unehumiliation « incompatible avec la religion », un stigmatede leur séropositivité, ils affirment également que lepréservatif réduit le plaisir sexuel. Les femmes mariéesou célibataires rapportent les difficultés de négociationdu préservatif.Aucun patient interrogé ne dispose d’informationsprécises sur les données scientifiques liées au risquede transmissibilité du VIH associé à la prise de thérapieARV ; ils élaborent des stratégies en fonction deleurs expériences personnelles, ou de celles deleurs amis, pour concilier séropositivité, désir sexuel,désir d’enfant, peur de partage de l’information et risquede transmission du VIH. Les patients lient la notiond’indétectabilité du virus à celle de la baisse de la nocivitédu virus : « être indétectable », revient à « être inoffensif ».Une patiente qui a refusé d’avoir des relations non protégéesavec son époux, bien que celui-ci lui ait affirmé être« indétectable », l’a entendu déclarer : « une fois que c’estbloqué, comment ça va circuler dans le corps ? ».Le témoignage d’Abdou, 45 ans, artisan, illustre cetteperception :« Ce médicament empêche le virus de se multiplier, ille bloque quelque part au point où il ne peut plus semultiplier et s’éparpiller dans l’organisme, le virus a ététellement affaiblit qu’il se cache quelque part, ne peutplus circuler et ne peut plus faire du mal comme celales défenses se multiplient et on retrouve la forme ».Certains patients déclarent qu’ils respectent autant quepossible l’observance au traitement ARV pour maintenirleur « indétectabilité ». Ceux dont le partenaire estséronégatif, pour minimiser les risques de transmissiondu VIH, s’assurent d’une bonne hygiène intime, ont desrelations sexuelles « douces » ou pratiquent le retraitavant éjaculation. Les possibilités d’avoir des relationssexuelles presque normales avec un faible risque detransmissibilité du VIH et de rupture de la confidentialitérenforcent l’adhésion des patients au traitement ARV.La recherche de partenaire qui partagent le mêmestatut parmi les membres des associations de PVVIHn’est plus systématique ; les relations sexuelles nonprotégées avec des partenaires non informés sont deplus en plus fréquentes. Quelques hommes ont ainsieu des relations sexuelles non protégées avec leurpartenaire qui, après contrôle, est demeurée séronégative; ces relations non protégées sont parfois liéesà des situations complexes auxquelles les patientspeuvent difficilement se soustraire : unions forcées ouarrangées par l’entourage, détresse sociale pour desfemmes sans revenus, désir d’enfant très puissant…C’est le cas de Cheikh 50 ans, marié avec une femmeséronégative qui ignore sa séropositivité ; pressé parson entourage pour avoir un enfant, il finit par abandonnerl’usage du préservatif tout en étant très observant.Lorsque sa femme est enceinte, il lui fait subir untest VIH qui revient négatif ; il explique l'absence detransmission du VIH à son épouse ainsi :« Je me suis dit que c’est grâce aux médicamentsque je prends que je ne l’ai pas contaminée, le médicamenta dû diminuer la virulence du microbe aupoint que je ne pouvais pas la contaminer ».149

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