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Bernard Taverne, Alice Desclaux, Papa Salif Sow

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CHAPITRE V-1Perceptions et prise en charge des échecs thérapeutiquesird-00718213, version 1 - 16 Jul 2012dans un usage ambigu qui semble plus appliqué àl’individu qu’au virus. Plusieurs patients utilisent lamême expression pour expliquer leur changement detraitement : « Je suis résistant… ». Mais dans ceterme, il apparaît parfois que c’est le corps du patientqui produit en lui-même une forme de moindre efficacitédes médicaments, voire même qu’il existe unedimension psychologique à cette résistance comme ledécrit un patient : « A un moment, je n’arrivais plus àprendre mes médicaments, je n’acceptais plus, jerésistais. Si tu prends les médicaments et que tun’acceptes pas, les médicaments ne font pas grandchose. Il faut l’accepter d’abord. Tant que tu n'acceptespas, les médicaments ne font pas d’effets ; une foisle docteur m’a dit “tu as dû rester 6 mois sans prendretes médicaments ?”, je lui ai dit : “Non docteur, c’estque je ne les accepte pas, c’est tout” ».L’autre terme employé fait référence à « l’efficacité »des médicaments : des patients évoquent la moindreefficacité des traitements et se réfèrent aux propos demédecins expliquant que « le traitement n’est plusefficace », « qu’il ne marche pas » ou bien qu’ils vontdonner un « traitement plus efficace ».3.2.1.2. Les causes de l’inefficacité des traitementsLes patients lient la perte de l’efficacité des traitementsà diverses causes :– La faible efficacité des premiers traitementsDeux patients attribuent leur résistance aux bi-thérapiesavec lesquelles leur prise en charge thérapeutiquea débuté (1) ; ils affirment que « ces traitementsn'étaient pas efficaces » alors qu’ils respectaient scrupuleusementles consignes de prise.– Les effets indésirables et les contraintes horairesdes prisesLa difficulté à suivre correctement les prescriptions àcause des effets indésirables des traitements est mentionnéepar dix-neuf patients parmi les vingt-troisrencontrés. Ces patients citent nausées, vomissements,maux ventre et diarrhées, douleurs musculaires,fatigue qui les ont conduit à interrompre leur traitementinitial après quelques semaines ou quelquesmois. Certains mentionnent également les contrainteshoraires des prises médicamenteuses qu’ils ne sont(1) Quelques patients ont reçu des bi-thérapies au début de la mise en placedu programme national de traitement, en 1998 ; à cette époque subsistaientencore quelques doutes sur la nécessité de l’usage obligatoire de l’antiprotéase,la seule disponible était l’Indinavir.pas parvenus à adapter à leur vie quotidienne, et lenombre élevé de comprimés à avaler qu’ils n’ont plusacceptés. Le Crixivan® (IDV) garde la réputation d’unmédicament difficile à supporter. La plupart de cespatients reconnaissent que ces contraintes se sontallégées avec l’arrivée de nouveaux traitements, maisde nouvelles plaintes portent maintenant sur leKaletra® (LPV/r). Les comprimés sont jugés volumineux,difficiles à avaler, amers, et le produit provoqueraitdivers effets indésirables (nausées, vomissements,somnolence, troubles de l’équilibre, vertiges,maux de tête, fatigue). « Mon problème c’est vraimentce nouveau médicament » se plaint un patient, « Je nesuis pas motivé pour le prendre » affirme un autre.– La moindre efficacité des médicaments génériqueset des médicaments périmésLa crainte d’une moindre efficacité des médicamentsARV génériques avait été notée lors d’enquêtes réaliséesen 2005, peu de temps après leur premièredispensation au Sénégal. En 2009, la plupart des ARVdistribués au Sénégal sont des formes génériques ; lasuspicion sur la moindre qualité de ces médicamentsperdure encore et alimente chez quelques patientsl’inquiétude sur leur efficacité : « Avec les génériques,on a l’impression que l’on a diminué la dose, on n’apas respecté le dosage, la personne peut être observanteet ne pas réagir au traitement car ce n’est pasdosé comme il faut. Il ne faut pas culpabiliser lespatients, il y a des médicaments, moi je l’ai constaté,qui ne sont plus efficaces ! ». Cette inquiétude estégalement présente pour des médicaments prochesdes dates de péremption qui ont été à plusieurs reprisesdistribués ces dernières années à l’occasion desituation de déficit d’approvisionnement. Un patientexplique : « J’ai vu des cas où on a distribué des médicamentspérimés à des patients, on [le pharmacien] luia dit “c’est encore bon, tu peux les prendre”, mais lepatient n’a pas pris ces médicaments ».– L’isolement, l’absence de soutien, la crainte d’unerupture de confidentialitéL’isolement social et l’absence de soutien sont jugéscomme ayant un impact direct sur l’observance et surl’efficacité des traitements : « Les personnes isoléesou qui vivent dans un environnement non compréhensifont des difficultés à prendre correctement leurtraitement » déclare un patient. Un autre précise : « Cequi nous fatigue, c’est l’environnement, la famille,prendre les médicaments devant la famille, parfois çadérange, parfois il y a des personnes qui sont curieusesqui veulent savoir quel médicament tu prends etce que ça soigne ; prendre les médicaments à côté de302

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