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Bernard Taverne, Alice Desclaux, Papa Salif Sow

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CHAPITRE III-4 Les plaintes et leur interprétation : effets des antirétroviraux, du VIH ou du vieillissement ?ird-00718213, version 1 - 16 Jul 2012cament curatif avant que les médicaments ne fassentd’autres effets » (Soukeye)Certaines personnes évoquent le contexte favorable dela prise en charge par l’équipe du CHU de Fann qu’ellesassocient au traitement, ce qui montre que le sentimentde sécurité qu’apporte le traitement est en grande partieconstruit par le suivi médical associé :« Ah, je suis encore là, donc c’est efficace. Ce sont leseffets secondaires seulement qui posent problème maissinon, c’est efficace. C’est réconfortant de savoir que sion prend ça on peut encore aller de l’avant. Et puis il y ales médecins qui sont là, qui nous suivent pas à pas, quisupportent nos caprices (…) parfois c’est dur pour euxhein. Tu as ton malade qui ne prend pas ses médicamentset qui dit qu’il les prend… » (Fanta)D’autres personnes expriment aussi leur sentimentd’avoir été « élues » en recevant ce traitement :« Si je devais parler des effets du traitement de façonobjective, je dirais que le traitement est bon. Je rendsgrâce à Dieu parce qu’il y a des gens qui en souffraientet qui n’ont pas bénéficié du traitement. Donc il y a dequoi se réjouir. En plus, je ne peux pas dire que ceciou cela a été causé par le traitement. En tout cas, demon côté. Chacun a sa façon de voir et de sentir leschoses. Mais moi, je n’ai pas de problème. Je considèreles médicaments (antirétroviraux) comme toutautre médicament. Comme l’aspirine, la vitamine C, leparacétamol. D’ailleurs, j’ai mis mes médicamentsdans des boîtes de vitamine C. Je n’ai vraiment aucunproblème. » (Laffia)Ce sont surtout les personnes atteintes de lipodystrophiessévères qui disent que leur traitement est « tropfort » (Karimatou) ou difficile à supporter :« Xana metti rék, mettina dé mom (c’est très dur). Lemédicament est problématique. Tu dois l’emporter là oùtu vas. Ça déjà, c’est des problèmes. En plus ils m’ontcausé des effets secondaires, mon corps n’était pascomme ça. » (Tabara)C’est aussi le cas d’une personne qui souffre beaucoupde son état clinique marqué par une obésité et deslipodystrophies dans le contexte social d’une jeunefemme qui ne parvient pas à se marier. Elle discute lesperceptions très favorables des antirétroviraux expriméespar les autres patients :« A part le médecin, est-ce que vous avez discutéavec d’autres personnes ?-Non, vous avez l’impression que les gens se suffisentde peu. Le fait d’avoir les ARV gratuitement, pour euxc’est, c’est le ciel en cadeau. Mais, moi, ça ne me suffitpas… » (Aïda)3.2.3. Les perceptions du mode d’actiondu traitementPour toutes les personnes qui se sont exprimées à cesujet, le traitement va dans le sang, car c’est là qu’estle virus.« Les médicaments vont dans le sang et endorment levirus » (Ndella)« … d’autant plus que c’est toujours dans le sangqu’on vérifie l’état de la maladie » (Codou)« Ils atténuent le virus et le mettent en quarantaine.Ainsi, il ne pourra pas se multiplier. Le médicament netue pas le virus, mais il l’endort à tel point qu’il nepuisse plus bouger. C’est comme un somnifère »(Sofiatou)On reconnaît ici deux métaphores biomédicales,utilisées dans les séances d’information pour lespatients, qui se télescopent : celle de la « mise ensommeil » permet d’expliquer que le traitement ne faitpas disparaître le virus, et d’évoquer les risques liés àl’inobservance ; celle de la « guerre entre virus etmédicaments » est utilisée pour expliquer le rôle desCD4. La contradiction ne paraît pas gênante, lespersonnes disent rapporter ce que les médecins et lesassociations leur ont expliqué.« Bon, d’après ce que le médecin a dit, si tu continuesà prendre correctement les médicaments, ils finirontpar gagner le combat avec la maladie. C’est d’ailleurspourquoi on nous demande de respecter le traitementsinon le virus risque d’être puissant » (Dibor).Une personne rapporte de manière détaillée unpropos dont des éléments sont exprimés par plusieursrépondants :« J’ai une fois rencontré une dame qui essayait de meconvaincre d’aller voir un médecin traditionnel mais jelui ai dit ‘Laisse-moi suivre le traitement là, puisqu’onm’a donné un « somnifère » car, si jamais tu ne prendspas tes médicaments, en une fraction de seconde levirus peut se multiplier…’ Si jamais tu restes desmoments sans prendre ses médicaments, c’estcomme la tuberculose, si tu reprends le traitement, ladose habituelle ne te suffira pas, on sera obligé de tedonner un autre traitement et il y a des risques. Alorscela ne sert à rien de ne pas respecter son traitement.161

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