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Bernard Taverne, Alice Desclaux, Papa Salif Sow

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CHAPITRE IV-3Le partage de l’information sur son statut sérologique dans un contexte de polygamieird-00718213, version 1 - 16 Jul 2012recherche de soins et d’avoir avec elle une relationplus amicale. Elle l’accompagne à l’hôpital ou Amie,dépistée positive, est mise sous ARV. Depuis lors, lesrelations avec sa coépouse sont devenues pluscordiales. Son époux se plaint des sommes importantesqu’elles exigent toutes les deux pour divers fraisliés à leurs soins. Il estime qu’elles exploitent lecontexte pour lui « soutirer » un maximum de ressourcesfinancières mais fait face à leurs demandes sanssourciller.3.8.2. Un partage hiérarchisé de l’informationD’autres situations similaires concernant le partage del’information en situation de polygamie confirmentqu’en cas de séropositivité VIH d’abord dépistée chezl’homme, l’information est rarement partagée avec lesdernières épouses les plus jeunes ou les dernièresarrivées dans le ménage. Les hommes enquêtés, quireconnaissent avoir eu des comportements sexuels àrisque susceptibles d’être à l’origine du VIH, estimentqu’ils courent le risque de dévoiler leur statut sans êtresûrs de la séropositivité de la dernière épouse, qui aété exposée depuis moins longtemps au risque detransmission sexuelle que les premières épouses.Avec celles-ci, ils ont souvent déjà plusieurs enfants etse sentent plus en sécurité. Ils craignent égalementavec leurs dernières épouses de s’exposer non seulementà la divulgation de leur statut dans leurs famillesd’origine, de faire l’objet d’accusations à la fois desfemmes et de leur famille, d’accroître les conflitspréexistants mais également d’être soumis à unepression financière à laquelle ils pourront difficilementse dérober. Les premières épouses partagent souventles appréhensions des conjoints sur le partage avecles autres coépouses et les soutiennent dans lapréservation du secret. Ces circonstances leurpermettent d’être plus proches de leur époux etd'accroître leur influence dans le ménage.3.8.3. Un partage de l’information étendu à tous lesconjointsToutefois, certains patients fortement encouragés etsoutenus par les professionnels de santé acceptent departager l’information avec toutes leurs épouses quisont alors dépistées à tour de rôle. Lorsque toutes lesépouses et le conjoint sont séropositifs, une dynamiquede solidarité avec soutien mutuel pour l'acceptation,l’adhésion et l’observance aux ARV peut se développerentre les conjoints. Toutefois, lorsque l’un desconjoints est séronégatif dans un ménage polygamique,des situations difficiles peuvent être observéesavec abandon du domicile conjugal par le partenaireséropositif, divorce, ou le choix du secret généralementvécu avec souffrance et sentiment d’insécurité.Dans ce contexte, des cas de partage del’information sous la pression des professionnels desanté ou de rupture de confidentialité dans des situationsde polygamie ont été à l’origine de conséquencespéjoratives pour les femmes séropositives. C’estle cas de Sophie, 35 ans mariée en secondes nocescomme deuxième épouse, très démunie : elle enparle à un colocataire en qui elle a confiance mais quidécide d’en parler à son oncle. Elle a été obligée defuir son village, enceinte avec son enfant pour êtrehébergée à Dakar durant plusieurs mois dans leslocaux de l’association des femmes vivant avec leVIH. Elle raconte :« Mon oncle en a parlé à mon mari, qui a refusé defaire le test et l’a répété à sa première épouse qui ena parlé à tout le village, les gens ont commencé à mefuir, ils me fuyaient ils ne voulaient même pas que jetouche à leurs affaires. C’est la raison pour laquellej’ai quitté mon village. J’ai reproché à la personned’avoir répété le secret à la famille, il a dit qu’il voulaitseulement que les gens m’aident davantage »3.8.4. Des coépouses qui gardent le secretPour les femmes ayant déjà été mariées, remariéesen seconde ou troisième position, susceptiblesd’avoir été infectées par le VIH en dehors de l’unionen cours, c’est généralement à l’occasion d’une grossessequ’elles sont informées de leur statut sérologique.Dernières venues dans le ménage, souventsans enfants avec leur conjoint, le risque de stigmatisationou de rejet est très important dans ce contextede polygamie. Ces femmes choisissent généralementde ne pas divulguer leur statut à leur épouxsurtout lorsqu’elles ont eu un itinéraire de vie avecdes situations à risque de VIH connus de leur entouragefamilial : décès suspect d’un époux immigré,multipartenairat…Dans ce contexte, partager l’information sur la séropositivitéVIH est perçu comme un acte de dévoilementavec risque de « dépréciation » alors que l’onne connaît pas le statut sérologique du conjoint etqu’il n’est pas certain qu’il accepte de se faire dépister,ni qu’il soit séropositif.3.8.5. Des stratégies de maintien du secretPour éviter de partager l’information avec leur partenairetout en ne les exposant pas au risque de transmissionsexuelle, certains patients préfèrent éviterles relations sexuelles avec leur conjoint ou retournerdans leur famille d’origine.225

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