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Thèse 1999 - UFR Droit et Sciences Sociales

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Au fond, la coexistence de représentations différentes du rôle des interprètes<br />

montre combien il est difficile pour les auteurs de définir leur légitimité<br />

scientifique <strong>et</strong> politique.<br />

Que la doctrine universitaire soit réellement un corps, une classe ou une<br />

communauté, importe assez peu. Elle a face à elle des corps constitués <strong>et</strong> les<br />

porte-parole des institutions. Tous ont des voix doctrinales dissonantes <strong>et</strong> tous<br />

tentent de comprendre la positivité du droit afin d'en maîtriser l'évolution. Le<br />

Législateur, la Cour de cassation, la Doctrine sont les trois protagonistes de<br />

notre clafoutis positif ; le premier pose des règles applicables, la deuxième juge<br />

conformément à ces règles, <strong>et</strong> la troisième donne son sens à “ règle<br />

applicable ”. L'article 12 al. 1er du nouveau Code de procédure civile résume<br />

en une phrase toute la détresse d'un système légaliste <strong>et</strong> toute la richesse d'une<br />

approche épistémologique. "Le juge tranche le litige conformément aux règles<br />

de droit qui lui sont applicables (412) ", mais les normes juridiques applicables<br />

varient selon les théories de la validité (413) <strong>et</strong> le droit français est nourri<br />

d'influences contradictoires. Des juges croient pourtant au dogme de la<br />

solution unique pour affirmer qu'une solution n'a qu'un seul fondement<br />

possible (414) , à moins évidemment que la solution unique, sûre <strong>et</strong> permanente,<br />

ne soit qu'un leurre rhétorique, voire sophistique (415) .<br />

(412) C’est avec ce texte la consécration législative d’une perspective philosophique dont les assises doctrinales<br />

se trouvent chez le principal auteur : Henri Motulsky. À tort ou à raison, c’est à lui que l’on attribue la<br />

paternité de la formule, <strong>et</strong> le sens du texte s’éclaire des écrits théoriques <strong>et</strong> méthodologiques de c<strong>et</strong> illustre<br />

processualiste ; v. G. BOLARD, "Les principes directeurs du procès civil : le droit positif depuis H. Motulsky",<br />

JCP 1993.I.3693 ; G. CORNU, "Les principes directeurs du procès en eux-mêmes (fragment d'un état des<br />

questions)", Études offertes à P. Bell<strong>et</strong>, Paris, Litec, 1991 ; J. HERON, "Le nouveau Code de procédure civile",<br />

in B. BEIGNIER (dir.), La codification, précité, p.81.<br />

(413) N. MACCORMICK, Raisonnement juridique <strong>et</strong> théorie du droit, précité, 1996, p.241 s.<br />

(414) Cass. civ. 1ère, 14 mai 1996, RJDA 10/96, n°1177, p.849 ; Cass. civ. 1ère, 17 juin 1997, Bull. civ.<br />

I, n°237 ; Cass. civ. 1ère, 9 février 1994, pourvoi n°91-19.878 lexis ; Cass. civ. 1ère, 27 octobre 1993,<br />

D. 1994, p.212 à propos de l'action en garantie des vices cachés. Ces arrêts utilisent la même formule comme<br />

un refrain ; adde, J. F. PERRIN, "Comment le juge suisse détermine-t-il les notions juridiques à contenu<br />

variable ?", in Ch. PERELMAN (dir.), Les notions à contenu variable, Bruxelles, Bruylant, 1984, p.218 : à<br />

propos de jugements du Tribunal fédéral suisse affirmant "Rechercher le sens d'un concept juridique dit<br />

imprécis ce n'est pas, selon l'opinion dominante, poser un acte d'appréciation mais résoudre une question de<br />

droit (…) Il est vrai que tels concepts doivent être précisés dans chaque cas particulier <strong>et</strong> appliqués à l'état de<br />

fait concr<strong>et</strong>. Mais ils ne laissent pas de choix entre deux ou plusieurs solutions d'égale valeur. C'est toujours<br />

une seule interprétation qui est juste <strong>et</strong> c'est à l'autorité qui doit appliquer une disposition légale qu'il<br />

appartient de trouver c<strong>et</strong>te interprétation".<br />

(415) Ph. JESTAZ, "Déclin de la doctrine ?", <strong>Droit</strong>s-20, p.93 : "(…) Les juristes actuels s'efforcent de débusquer<br />

les enjeux réels derrière le vernis des concepts juridiques (sauf à le faire au coup par coup <strong>et</strong> sans vision<br />

globale). Les grands anciens n'y songeaient guère, qui croyaient ou s'efforçaient de croire à un droit neutre.<br />

Mes amis de Bruxelles racontent l'histoire de ce vieux professeur qui se fâchait tout rouge quand on m<strong>et</strong>tait en<br />

doute la neutralité du droit. Mais il avait des émules en France, qui, à partir d'axiomes considérés par eux<br />

comme indiscutables (en réalité refl<strong>et</strong>s d'une idéologie), prétendaient déduire la chaîne des solutions de façon<br />

quasi mathématique, sans s'étonner que la pseudo-déduction les menât comme par hasard à un résultat

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