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Thèse 1999 - UFR Droit et Sciences Sociales

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304<br />

déjà établie par la possession d'état" ; a contrario, la reconnaissance est valable,<br />

l'action en recherche est recevable, quand l'enfant n'a pas la possession d'état<br />

d'enfant légitime. Au vu des travaux préparatoires de la loi du 3 janvier<br />

1972 (1043) , la lecture a contrario paraissait un mode normal de compréhension<br />

du texte, sa finalité étant de rompre avec l'omnipotence de la présomption de<br />

paternité légitime : lorsque le titre de l'enfant porte indication du nom du<br />

mari, la présomption qui joue en dépit de l'intérêt de l'enfant pourrait être<br />

renversée ; le texte a contrario perm<strong>et</strong> alors la contestation de la paternité<br />

légitime, en dehors des hypothèses de désaveu <strong>et</strong> de contestation par la mère.<br />

L'arrêt de la première chambre civile du 9 juin 1976 consacra la thèse<br />

défendue par les partisans de la lecture à l'envers. Le débat doctrinal qui<br />

accompagna c<strong>et</strong>te décision fut âpre. Le professeur Raynaud insistait : "Mais il<br />

faut redire (…) que l'intérêt de l'enfant est avant tout de ne pas être un enjeu,<br />

de ne pas être celui que l'on s'arrache ou que l'on se renvoie (…). Le défaut<br />

essentiel de l'interprétation a contrario de l'article 334-9 est d'ouvrir de<br />

nouveaux champs de bataille alors que c'est la paix qui est le premier intérêt<br />

de l'enfant (1044) ". Dans une note approbative de l'arrêt, M. le doyen Cornu<br />

répondait que les deux sens positif <strong>et</strong> négatif du texte étaient indissociables,<br />

mais au-delà d'une exégèse textuelle <strong>et</strong> contextuelle, il restait encore à<br />

s'interroger : "sommes-nous sûrs de ne plus tourner contre l'enfant notre<br />

jugement sur l'adultère ? (1045) ". L'enjeu est là (au moins en apparence) ;<br />

certains le regr<strong>et</strong>tent, d'autres acceptent que la loi <strong>et</strong> la jurisprudence<br />

consacrent c<strong>et</strong>te idée que la présomption de paternité légitime n'ait plus toute<br />

son emprise passée. L'intérêt de l'enfant est-il d'être légitime grâce au “masque<br />

hypocrite” de la présomption, selon les mots du professeur Raynaud, ou d'être<br />

naturel <strong>et</strong> certain de l'être ? Françoise Dolto montrait que l'on ne construit pas<br />

son identité sur un mensonge. Que la vérité soit difficile à dire, qu'elle soit<br />

source de conflit <strong>et</strong>, en l'espèce, de conflits de filiations, c'est une certitude ;<br />

elle est pourtant seule structurante (1046) .<br />

Traduit par les juristes, la lecture a contrario impose une plus grande<br />

attention portée à la possession d'état comme fondement <strong>et</strong> preuve du lien de<br />

filiation, pour que l'absence ou l'équivocité de la possession conduisent à ce<br />

que soit faite la clarté sur la réalité biologique. L'enfant doit pouvoir connaître<br />

(1043)<br />

J. FOYER, Président de la commission des lois, rapporteur de la loi à l'Assemblée nationale, Doc. ass. nat.<br />

n°1926, p.77.<br />

(1044)<br />

P. RAYNAUD, note sous Cass. civ. 1ère, 9 juin 1976, D. 1976, p.597.<br />

(1045)<br />

G. CORNU, note sous Cass. civ. 1ère, 9 juin 1976, JCP 1976.II.18494.<br />

(1046)<br />

F. DOLTO, Tout est langage, Paris, Gallimard, nrf, 1995, p.8.

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