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Thèse 1999 - UFR Droit et Sciences Sociales

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208<br />

133. Le droit comme unité - Ronald Dworkin illustre sa thèse de l'unité du<br />

droit - le droit comme intégrité - au moyen de la métaphore de la chaîne<br />

narrative (748) . Sorte de roman (ou d'épopée ?) écrit chapitre après chapitre de<br />

la main des juges, le roman du droit raconte la découverte <strong>et</strong> l'application des<br />

principes <strong>et</strong> des règles qui forment le droit positif (749) . La cohérence de la<br />

globalité de l'oeuvre - la cohérence narrative - est assurée par la raison qui<br />

anime chaque auteur de chapitre, chaque interprète authentique. Certes<br />

l'unité du droit est postulée mais c<strong>et</strong>te axiomatique s'explique par le fait que le<br />

système produit les conditions <strong>et</strong> les modalités de son propre renouvellement.<br />

Outre que c<strong>et</strong>te métaphore est séduisante en présentant l'interprète judiciaire<br />

sous l'aspect d'un écrivain cohérent, loin du poète surréaliste ou du prêcheur<br />

ésotérique sous les traits duquel la doctrine le dessine parfois (750) , elle perm<strong>et</strong><br />

de légitimer largement une certaine adhésion des juristes à l'idée que le passé<br />

prépare l'avenir <strong>et</strong> que les (bonnes) raisons actuelles de décider sont à<br />

rechercher dans les chapitres précédents. L'utilisation du précédent, non<br />

comme solution mais comme outil heuristique, perm<strong>et</strong> dans c<strong>et</strong>te perspective<br />

de découvrir les arguments <strong>et</strong> les raisons qui hier ont prévalu pour fonder les<br />

solutions anciennes, si bien que la cohérence postulée de la narration <strong>et</strong> de<br />

l'évolution de l'ordre juridique s'avère un moyen pour le juge de trouver, au<br />

présent, l'état positif des principes par lesquels le droit exprime ses raisons<br />

pratiques.<br />

Il faut comprendre que pour Dworkin, le droit positif est le produit d'une<br />

évolution des solutions <strong>et</strong> des textes, mais également des raisons de décider ; <strong>et</strong><br />

(748)<br />

R. DWORKIN, "La chaîne du droit", <strong>Droit</strong> <strong>et</strong> société, 1985, n°1, p.51 ; L'empire du droit, trad. par<br />

E. Soubrenie, Paris, PUF, 1994, p.250.<br />

(749)<br />

Dworkin n'est pas le premier à associer un raisonnement en principes <strong>et</strong> en règles faisant du juriste le<br />

dépositaire d'un savoir total ; v. G. DEL VECCHIO, "Essai sur les principes généraux du <strong>Droit</strong>", Rev. crit. légis.<br />

<strong>et</strong> jur. 1925, p.153 (p.165) : "A priori il est impossible que d'un principe général on puisse tirer des<br />

applications qui seraient en contradiction avec une règle particulière. C<strong>et</strong>te exigence se fonde essentiellement<br />

sur la nature du système juridique, lequel doit former un assemblage unique <strong>et</strong> cohérent, un véritable<br />

organisme logique, susceptible d'offrir une directive certaine, non équivoque, <strong>et</strong> ne comportant aucune<br />

solution contradictoire pour tout rapport social possible. L'harmonie intime des différentes parties composant<br />

le système doit être essayée <strong>et</strong> confirmée à chaque instant, en rapprochant les règles particulières entre elles, <strong>et</strong><br />

par rapport aus principes généraux auxquels elles se rattachent. C'est seulement par là que le juriste peut<br />

comprendre l'esprit profond du système <strong>et</strong> le suivre dans ses applications particulières, en évitant les erreurs<br />

qui ne manqueraient pas de se produire s'il se contentait de ne considérer, d'une manière abstraite, que telle ou<br />

telle règle. Le juriste <strong>et</strong> particulièrement le juge, doivent, autant que possible, dominer <strong>et</strong> pour ainsi dire<br />

revivre le système entier, en se pénétrant de son unité spirituelle, depuis les principes lointains <strong>et</strong> sousentendus,<br />

jusqu'aux plus minimes dispositions de détail, comme s'ils étaient l'auteur du tout, qu'en eux la loi<br />

parle réellement" [souligné par nous].<br />

(750)<br />

F. CHABAS note sous Cass. civ. 2ème, 25 janv. 1995, Gaz. pal. 18/20 juin 1995, p.28 : "Toute révérence<br />

gardée envers la Cour suprême, l’arrêt, de cassation <strong>et</strong> de principe, rendu par la 2ème chambre civile le 26 mai<br />

1992, comporte un chapeau qui est un chef d’oeuvre d’ésotérisme ! Lecteur r<strong>et</strong>iens ton souffle…"

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