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Thèse 1999 - UFR Droit et Sciences Sociales

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temps. Dworkin l'adm<strong>et</strong> du reste : "le raisonnement du juriste s'appuie sur la<br />

notion de cohérence normative, qui est clairement plus complexe que la<br />

notion de cohérence narrative (765) ". C<strong>et</strong>te cohérence idéale, axiomatique,<br />

politiquement <strong>et</strong> socialement utile est exprimée de manière dynamique à<br />

travers la chaîne narrative <strong>et</strong> à travers les chapitres précédents qui ont écrit la<br />

complexité du droit positif. Mais ces chapitres rassemblent des textes <strong>et</strong> des<br />

énoncés jurisprudentiels d'époques différentes répondant à des préoccupations<br />

sociales différentes, rédigés dans des styles différents, rendant compte<br />

d'intentions législatives différentes. Par quel enchantement ces couches<br />

superposées antinomiques seraient-elles rendues non-contradictoires sans<br />

poser a priori un axiome de non-contradiction ?<br />

Il est difficile de ne pas penser que de solutions uniques en bonnes<br />

réponses, la continuité du droit ne se construit pas par rétrodiction. Il faut<br />

s'interroger. La rationalisation a posteriori qui perm<strong>et</strong> de réinterpréter la<br />

chaîne du droit une fois rendues des décisions incongrues, ferait-elle aussi<br />

partie du système ? Car il n'est pas douteux que pour être cohérente, la chaîne<br />

narrative est constamment réinterprétée à la lumière des décisions nouvelles.<br />

Sauf à considérer que le droit est pleinement prédestiné, la continuité ne se<br />

découvre qu'au réexamen permanent du passé par une rationalisation a<br />

posteriori faisant regagner aux décisions ésotériques ou insolites le giron du<br />

"droit comme intégrité". Les arrêts provocateurs condamnés pour leurs eff<strong>et</strong>s<br />

immédiats sont après coup reconsidérés à la lumière de leurs avatars pour<br />

devenir souvent les événements décisifs sans lesquels des réformes nécessaires<br />

n'auraient jamais eu lieu. C'est aujourd'hui la manière dont la doctrine<br />

interprète l'arrêt Desmares du 21 juill<strong>et</strong> 1982. C<strong>et</strong>te décision, qui fut<br />

abondamment critiquée (766) , revenait sur la possibilité de partager la<br />

responsabilité entre la victime <strong>et</strong> le gardien de la chose en posant que la faute<br />

de la victime ne pouvait avoir une force exonératoire de la responsabilité du<br />

gardien qu'à condition de présenter les caractères d'un événement<br />

"imprévisible <strong>et</strong> insurmontable" : "seul un cas de force majeure exonère le<br />

(765) R. DWORKIN, Une question de principe, précité, p.180 ; comp. R. GUASTINI, "Théorie <strong>et</strong> ontologie du<br />

droit chez Dworkin", <strong>Droit</strong> <strong>et</strong> société 1986 n°2, p.15 (p.19) : "Il faut remarquer que c<strong>et</strong>te façon de penser de<br />

Dworkin est fondée sur une hypothèse difficilement démontrable : je veux parler du dogme de la cohérence du<br />

droit. Si un système juridique n'était pas considéré comme cohérent, on ne pourrait pas soutenir qu'une <strong>et</strong> une<br />

seule doctrine éthique <strong>et</strong> politique (bien que très générale <strong>et</strong> abstraite <strong>et</strong> donc indéterminée), est au fondement<br />

du système tout entier. Par contre, si le système n'est pas cohérent, on peut tirer de lui non pas une seule<br />

doctrine mais plusieurs doctrines politiques en conflit entre elles".<br />

(766) Cass. civ. 2ème, 21 juill<strong>et</strong> 1982, D. 1982, p.449, concl. CHARBONNIER, note LARROUMET ; JCP<br />

1982.II.19861, note CHABAS ; RTD civ. 1982, p.606, obs. DURRY ; Defrénois 1982, p.1689, obs. AUBERT.

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