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Violences d'aujourd'hui, violence de toujours - Rencontres ...

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<strong>Violences</strong> d’aujourd’hui, <strong>violence</strong> <strong>de</strong> <strong>toujours</strong><br />

DANIEL HALPÉRIN : Chaque matin, en <strong>de</strong>scendant <strong>de</strong> Champel<br />

pour me rendre à l’hôpital, où je travaille, je passe <strong>de</strong>vant un bloc<br />

<strong>de</strong> granit gris sur lequel est gravé le texte suivant : « Fils<br />

respectueux et reconnaissants <strong>de</strong> Calvin, notre grand réformateur,<br />

mais condamnant une erreur qui fut celle <strong>de</strong> son siècle et<br />

fermement attachés à la liberté <strong>de</strong> conscience selon les vrais<br />

principes <strong>de</strong> la Réformation et <strong>de</strong> l’Évangile, nous avons élevé ce<br />

monument expiatoire ». Ce monument, les Genevois l’auront<br />

reconnu, est celui qui a été dressé en 1903, soit trois cent<br />

cinquante ans après son exécution, à la mémoire <strong>de</strong> Michel Servet,<br />

brûlé vif pour avoir osé penser librement et n’avoir pas su se<br />

rétracter. Il a donc fallu trois cent cinquante ans pour que le<br />

peuple <strong>de</strong> Genève trouve le courage d’élever ce monument.<br />

Courage tout relatif, d’ailleurs, compte tenu du texte que je viens<br />

<strong>de</strong> vous lire, qui brille par une certaine pusillanimité, tant il est vrai<br />

qu’il attribue à l’époque la p.269 responsabilité d’un assassinat qui<br />

pourtant avait bel et bien un instigateur en chair et en os. Il faut<br />

rappeler que le siècle <strong>de</strong> Calvin, auquel on a voulu faire porter la<br />

responsabilité <strong>de</strong> ce fanatisme meurtrier <strong>de</strong> la pensée, était aussi<br />

le siècle <strong>de</strong> Montaigne et <strong>de</strong> Castellion — cet humble et magnifique<br />

Castellion, qui eut le courage vers 1550, bien avant Locke, Hume<br />

ou Voltaire, d’affirmer au risque <strong>de</strong> sa vie que tuer un homme, ce<br />

n’est pas défendre une doctrine, c’est tuer un homme. Je vous<br />

encourage à lire l’ouvrage émouvant que Stefan Zweig lui a<br />

consacré, et qu’il a intitulé Conscience contre <strong>violence</strong>.<br />

De cette évocation émergent <strong>de</strong>ux réflexions. Premièrement, les<br />

processus <strong>de</strong> « guérison » — je mets <strong>de</strong>s guillemets, parce qu’il<br />

faudrait pouvoir s’interroger plus longuement sur le sens qu’on<br />

donne à ce terme : peut-être vaudrait-il mieux parler <strong>de</strong><br />

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