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Pierre Montagnon - La guerre dAlgerie

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Bou-Saada 7 . Sous les yeux du chef de famille garrotté, sa belle-mère, sa

femme, sa fillette de sept ans ont été violées, puis égorgées. L'homme, le

dernier, a été égorgé à son tour ;

– dans la commune mixte de Djendel, un fermier européen de Lavigerie est

empalé et rôti vivant ;

– dans la commune mixte des Brazz (région de Miliana), au douar Bourrad,

un ancien combattant de la Grande Guerre est retrouvé mort, attaché à un

poteau, la chair arrachée avec des tenailles. Il avait payé sa fidélité à la

France ;

– à Canrobert, dans le Constantinois, trois jeunes écoliers européens partis

jouer chez un camarade musulman sont égorgés et leurs cadavres dissimulés

dans un puits.

Ce n'est pas le propos de cet ouvrage de dresser un mémorial et de

recenser les exactions et atrocités. La véracité historique impose

simplement, dût-il en coûter, de rapporter certains de ces faits pour

dépeindre le climat d'une guerre d'où la sauvagerie n'était pas absente.

La violence accompagne l'horreur. L'armée en campagne se considère

souvent en pays conquis, à plus forte raison lorsqu'elle vient d'être

traumatisée par une découverte du genre de celles précédemment relatées.

Les mechtas dites rebelles s'embrasent. Les gourbis ne font qu'une torche.

Le bétail est abattu ou regroupé pour améliorer l'ordinaire. Les rafales

s'égayent généreusement sur les fuyards ou les apeurés terrés dans un creux.

Les prisonniers sont exception. La vie humaine pèse peu au hasard du face

à face. Mieux vaut tirer le premier, estiment les combattants et aucun chef

ne s'insurge de ce réflexe d'autodéfense. Alors, les bavures s'additionnent.

Dans ce paquet de hardes caché dans la broussaille qui peut, à première vue,

reconnaître une vieille femme d'un moussebiline recroquevillé sur son fusil

de chasse ?

Le sang coule, mais jamais l'armée française ne s'autorise un Oradour ou

un Lidice. Femmes et enfants gardent aux yeux du soldat un caractère sacré.

Les viols, quoi qu'on en ait dit, sont rarissimes. L'encadrement ne le

tolérerait pas et puis la crainte des maladies vénériennes, le manque d'attrait

des Mauresques prématurément usées assurent une assez large dissuasion.

Les troupes, passé la première fureur vengeresse, soignent, nourrissent et

veulent présenter un aspect humain 8 .

Mais cette action psychologique, voulue ou naturelle, n'estompe pas les

ravages causés. Les officiers S.A.S. le déplorent amèrement, eux qui se

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