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Pierre Montagnon - La guerre dAlgerie

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retirée du champ de bataille, la 11 e D.L.I. est rapatriée sur la France et

acheminée vers les brumes lorraines. Adieu le soleil et les vastes horizons !

Tous les corps d'intervention plus ou moins compromis ne peuvent être

éliminés sous peine de rompre l'équilibre opérationnel en Algérie.

L'encadrement seul est frappé. Les officiers des régiments dissous, les

meneurs dans les autres se retrouvent aux arrêts de forteresse à Maison-

Carrée d'abord, au fort de Nogent, puis au fort de l'Est ensuite. Venus des

quatre coins d'Oranie, de l'Algérois ou du Constantinois, ils reprennent en

rengaine le « Non, rien de rien, non, je ne regrette rien » que lançaient les

légionnaires du 1 er R.E.P. en quittant Zéralda, après la dissolution de leur

unité. Ils sont là, derrière les hauts murs, paras, légionnaires, marsouins,

aviateurs, marins même, unis par une passion mal éteinte 2 .

La justice militaire entame une procédure que le pouvoir veut rapide. Dès

le 27 avril, un décret gouvernemental a instauré un haut tribunal militaire.

Président : Maurice Patin. Membres : de hautes personnalités militaires dont

le grand chancelier de la Légion d'honneur et celui de l'ordre de la

Libération. Un autre tribunal militaire, plus modeste, se met également en

place pour juger les subalternes.

En fait, la répression sera relativement modérée. Les magistrats sont

sensibles aux motivations patriotiques des inculpés. Il y a aussi trop de

dessous douteux. L'affaire Si Salah fait partie de ces zones d'ombre qui

apportent des circonstances atténuantes. Quoi qu'il en soit les faits sont là :

il y a eu insurrection les armes à la main contre l'Etat, et la République,

dans son principe, a été menacée.

Ces procès ont leurs temps forts. Les témoins sont de qualité. Les ténors

du barreau se retrouvent derrière Jean-Louis Tixier-Vignancour ou Jean-

Marc Varrot. Le public, passionné, est acquis aux accusés. Les séances ne

peuvent être que chargées d'intensité dramatique.

Le général Gambiez vient à la barre accabler Maurice Challe. Il n'ignore

pas qu'on lui reproche son manque de clairvoyance, aussi ne ménage-t-il

pas son ancien condisciple :

« On ne nous a pas appris à Saint-Cyr à nous méfier de nos

camarades... »

Un jeune capitaine du 1 er R.E.P. donne aux débats leur tragique

dimension humaine. La voix parfois brisée par des sanglots qu'il ne peut

retenir, il brosse un tableau des paysans du Tonkin abandonnés sur la rive

indochinoise. Il évoque le tableau de toutes les missions qu'on leur a

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